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Monsieur Z. livre (presque) un témoignage d'élève

Julia Barré
17 mai 2020 12:11
5 mn

Warning : Tout ce qui va suivre est proprement fictionnel. Ainsi, toute ressemblance avec un élève lambda de lycée serait purement fortuite. Les propos n’engagent donc que Monsieur Z.

Bonjour je m’appelle Enzo, j’ai 15 ans, et suis en Seconde. Vous avez vu mon prof là ? Mais oui, celui qui écrit des chroniques dans les trucs du net. Ouais, il fait un peu sa star, j’avoue. Ils nous a demandé de faire un bilan de ses 50 jours de confinement. Nous, on pense un peu qu’il a fait ça car il avait plus rien à nous refiler comme exercice mais bon on a décidé de lui faire plaiz. Voilà donc l’exercice ci-joint (j’ai essayé de respecter la méthode du texte argumentatif).

Le confinement, c’est le fait de rester chez soi obligé car c’est l’État qui nous demande. Et là c’est borde (voilà, ça c’est la mise en contexte, je définis le sujet comme on m’a appris). Ce vendredi-là, quand on nous a dit que le lycée fermait, franchement c’était le plus beau jour de ma vie (je pense que ça va durer tant que ma femme elle accouchera pas). 
Faut dire que ça faisait des semaines qu’on pistait ça avec les potes, qu'on parlait du stade 3, qu'on avait que ça à la bouche et on avait jamais autant scruté les infos que les jours avant. En fait depuis le tirage de la Coupe du monde. Et là bim : Stade 3. Le prof, il avait l’air aussi content que nous en fait. Sereins on partait le vendredi. 
Et là, deuxième lame : le lundi, on devenait des confinés. Ah non j’oubliais Macron, le samedi il fermait les restos (je me rappelle j’étais dans un bar à chicha en train de déguster une fraise pomme, sérieux j’avais été choqué). Et là…

On devenait des confinés. 

Alors de suite on a parlé avec les potes, on s’est organisés pour faire tourner le pays (enfin le pays, pas la France hein, le pays de Fortnite). On a commencé à se répartir, à voir qui allait jouer avec qui. Ça prenait grave forme. Et puis, comme souvent quand on s’amuse, faut toujours qu’il y ait un triste sbire. Et c’était notre PP : on a reçu un mail et ça a balancé tous nos espoirs en l’air. C’était la continuité pédagogique.

Rien que le nom, ça faisait grave flipper. Et moi j’ai dit de suite à Ryan : « Comment il va faire la continuité, Steeve ? Il a jamais commencé l’année lui ! » 
En gros j’explique : on allait bosser à la maison comme si on était en classe, on allait recevoir des messages et on serait notés. Bref tout pareil sauf que j’allais pouvoir bosser en casquette-chaussette. C’était stimulant. Au bout de deux jours, ça a été TB. Les profs se sont tous changés en geek pires que nous. Ça a commencé avec les groupes (y en a qui ont créé des groupes Insta ou Snap avec nous, franchement trop bien). Enfin faut faire gaffe car la dernière fois Luca a dit au prof : « Oh tia trop pris la confiance ! » Il avait oublié que c’était le prof. 

On les voyait comme nos collègues mais fallait garder le respect. Du coup on s’est rendu compte que les profs, bah certains ils étaient comme nous. Quand j’ai écrit à Madame Français à 3h pour lui parler de ma rédaction, elle dormait pas ! Moi je croyais qu'elle se couchait à 21h avec une tisane devant un Armodolvar, bah non, elle m’a répondu (et même avec un smiley trop frais). On redécouvrait les profs. Même les plus tendus, en fait ils avaient une vie (et pas aussi cheum qu’on aurait cru vu leurs habits).

Après y'a eu les visios. 

Mais ouais carrément. Ils nous ont fait nous lever vachement tôt (10h !!!) et là on était en face de l’ordi ou du tel (enfin moi j’étais couché hein). On faisait un cours normal où on devait prendre des notes, normal (bon en vrai on faisait comme d’hab, on prenait pas les notes, mais au lieu d’être tous sur le tel en train de regarder Casa Del Papel, ben là du coup on matait le proffessor de Casa del Pautrel - notre prof de physique-chim). 

Franchement les profs ils se gavent question déco : on sent qu'ils passent leur week-end à faire des brocantes ou j’sais pas quoi. Ils ont dit à la télé ils ont réinventé la pédagogie "avec innovance et habilitation". Chapeau, ils ont assuré grave. ENFIN (j’vais pas faire le mec qui passe le coup de polish) pas tous. 
Y en a comme d’hab qui nous ont donné 35 pages d’exercices le premier jour et ils ont dû aller se faire confiner aux Bahamas. En gros c’était les mêmes qui assuraient pas de base devant nous. Mais je cite pas de noms, Monsieur vous savez, suis pas une poucave. 

Ce qui a été galère aussi c’est que comme souvent, la communication et les profs c’est pas trop trop ça. On s’est retrouvé avec un Zoom à 9h30 avec la prof de Maths mais à 9h50 un Discord avec Monsieur Z., enfin vous, et à 11h on devait faire des pepom avec Monsieur Didier le prof d’EPS. On aurait dit que les profs voulaient tous nous faire découvrir un logiciel différent, en même temps, aux mêmes heures. Embouteillages donc. Souvent les réseaux sautaient. Les profs râlaient. Nous on kiffait (enfin, au début).

Je saute une ligne là car j’entame une nouvelle partie. Nonobstant donc ce début prometteur il y a eu une rupture du schéma narratif dans le roman, que nous appellerons une péripétie. 
Voilà y'a Blanquer le ministre, le chauve : il a balancé que, pour les examens, on faisait contrôle continu et que les notes du confinement ne comptaient pas. Sérieux frère, tu nous as fait plaisir là ! Perso j’avais 15 de moyenne, j’étais serein (je me souviens ce soir-là en avril, on a fêté mon BEP avec mes darons, j’étais en mode festif). Je vous avoue qu’après j’étais grave moins motivé. 
Oui car je regardais un peu les chaînes info et j’étais pas trop sûr qu'on allait revenir en mai ou juin et qu’on allait faire des trucs du 3ème trimestre. Pour moi, le troisième trimestre c’était comme une… une utopie voilà. Du coup l’année a été un peu pliée rapide pour nous askip.

Je peux dire que j’ai rendu les devoirs : j’étais là en visio mais j’ai un peu décroché l’affaire. J’ai prévenu mon prof que je serai là trop déter l’année prochaine pour décrocher mon BAC. En plus, je crois que les profs aussi, de retour des pseudo-vacances de Pâques, ils ont un peu décroché comme nous. On le voyait à leurs yeux dans les visios : ils étaient plus du tout vifs comme au départ. Je crois que, même si on les rend fous, on leur manque un peu en fait. 

Et là depuis le 11 mai, je vous cache pas que c’est un peu le One man's land pour les cours : forcément depuis 50 jours qu’on s’était pas vus, ça a été difficile de rester devant l’ordi solo, même avec les profs cools. En plus ils ont réouvert les Micromania donc là c’est mort les profs. 

On devenait des déconfinés. (rime riche genre ISF) 

Du coup ce sera ma conclusion, pour répondre à la problématique “C’est quoi qui a changé pendant le confinement”. Je pense, en plus des kilos de choco que je me suis enfilés, que je me suis rendu compte que l’école c’était cool en fait, et que les profs, même si des fois ils font serrés, ils sont comme nous face aux trucs de la vie et ça nous a rapproché. 
Là je me languis presque de les revoir. Enfin pas tous. Le plus rapidement possible en fait. J’ai juré. Sur ma vie.

Je viens de recevoir un mail d’ailleurs où on me demande si je reviens début juin. J’ai dit non hein. En septembre hein.

Car « il ne faut pas abuser des bonnes choses qui viennent toujours à point ». 

C’était mon ouverture.

 

Monsieur Z. et son humour sévissent sur Facebook et sur Instagram @zarpinlep

Retrouvez toutes ses chroniques sur notre page Gérer le retour en classe et la continuité pédagogique avec EtreProf

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