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Il est clair que la nouvelle injonction à l’École est de proposer systématiquement à ses élèves du travail en collaboration. Que ce soit dans l’objectif militant de lutter contre l’individualisme acharné de notre société capitaliste, par effet de mode, par envie de changement, la coopération est la solution pédagogique à tous les problèmes de motivation, de niveau, d’attitude des élèves.
“Pourtant qu’en est-il de l’efficacité du travail de groupe ? Est-il montré que les élèves bénéficient d’être en îlots ? Que dit la recherche ?”
La question de la collaboration n’est pas nouvelle en éducation, même si elle a pris une ampleur nouvelle ces dernières années en France.
On peut la retrouver dans les travaux de Célestin Freinet qui datent de l’après-guerre, mais c’est surtout aux États-Unis dans les années 90 qu’elle est théorisée par les frères Johnson sous le nom de « cooperative learning ». Les enseignants se sont peu à peu emparés de ces concepts, créant ainsi une mode pédagogique présente dans de nombreux pays occidentaux.
Elle s’inscrit aussi dans un changement de statut de l’enseignant : il n’est plus perçu actuellement comme le seul détenteur du savoir. Cette idée découle d’une nouvelle conception de l’enfant comme personne à part entière, ayant pleinement des droits. L’élève devient un citoyen en construction, qu’il s’agit de former à de nouvelles compétences : l’autonomie, la collaboration, l’esprit critique. C’est dans cette démarche que l’apprentissage coopératif prend tout son sens.
“Comme toute injonction, comme toute solution miracle, le travail de groupe mérite d’être questionné pour ce qu’il apporte réellement aux élèves.”
Évidemment, comme la théorie existe depuis un certain temps et que les Nord-Américains adorent évaluer les dispositifs qu’ils mettent en place, de nombreuses études ont été menées sur l’enseignement coopératif depuis des années. C’est une bonne nouvelle !
De manière générale, les chercheurs sont dithyrambiques sur le travail de groupe, jusqu’à le qualifier d’« une des plus grandes innovations éducatives de la période récente » (Gillies, 2014). De nombreuses études et méta-analyses en soulignent ses apports en termes de motivation et de performance.
En y regardant de plus près, toutes les méthodes d’apprentissage coopératif ne se valent pas, si certaines ont montré des effets très positifs, d’autres, au contraire, s’avèrent totalement inefficaces. Ces résultats appellent donc à la nuance.
Réalisation du chef-d'œuvre, travail en atelier… Comment apprendre aux élèves à collaborer et travailler ensemble ?
Comme toute injonction, ce consensus apparent autour de la pédagogie coopérative nous pousse parfois à appliquer des trucs et astuces sans forcément réfléchir au sens de nos pratiques. Ainsi, avoir sa classe organisée en îlots en permanence n’a pas forcément de sens, car toutes les activités ne profitent pas de la disposition en groupes qui rendent malgré tout plus difficiles la concentration et l’attention individuelles.
De plus, on pense habituellement que c’est en se mettant dans la situation de collaboration que l’on va apprendre à collaborer, or cette conception est fausse. La coopération demande des qualités qui doivent être enseignées, au même titre que des connaissances disciplinaires. Ce n’est qu’à ce prix que le travail pourra être réellement collaboratif et ainsi échapper aux heurts d’un travail de groupe conflictuel, comme le rappelle C. Reverdy : « Pour la plupart des chercheur.se.s, ces habiletés s’acquièrent en classe et un apprentissage à coopérer explicite est gage d’interactions de qualité. Cela peut se faire sous la forme de jeux de rôle où les élèves apprennent à s’écouter, se distribuent les tâches, se partagent les responsabilités, s’entraînent à formuler des questions. » (La coopération entre élèves : des recherches aux pratiques, Catherine Reverdy, 2016).
Enfin, en 1882, Maximilien Ringelmann, un agronome, s’est rendu compte en travaillant sur la force de traction des bœufs puis des hommes, que ces derniers avaient tendance à tirer moins fort lorsqu’ils étaient en groupe plutôt que seuls. La psychologie sociale a appelé « paresse sociale » ce phénomène qui consiste pour chaque individu à diminuer les efforts qu’il fournit en groupe. Ce phénomène est un travers courant du travail coopératif qui peut être cependant évité sous certaines conditions.
La collaboration peut être un outil très intéressant pour favoriser la motivation et la performance des élèves, mais pas n’importe comment. Robert Slavin précise : « Lorsque la tâche du groupe est de faire et non d’apprendre quelque chose, la participation des plus faibles peut être ressentie comme une gêne plutôt qu’une aide. Il est alors plus facile de s’échanger les réponses que d’expliquer aux autres des concepts ou des compétences. Au contraire, si le groupe a pour tâche de s’assurer que chacun apprend quelque chose, il est dans l’intérêt de chaque coéquipier de passer du temps à expliquer les concepts aux autres. » (Apprentissage coopératif : pourquoi ça marche ? Slavin, R. E., 2010).
Les chercheurs s’accordent donc à dire qu’il faut que deux facteurs clés soient présents pour que cette pratique fonctionne pour tous les élèves :
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Merci pour ce point concis et clair. Auriez-vous des ouvrages de mise en pratique (des bonnes situations de coopération !) à conseiller ?