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L'environnement dans lequel un ou une élève évolue a une influence sur sa réussite. L'aménagement du temps, de l'espace et les modalités pédagogiques sont donc des paramètres à prendre en compte pour installer le sentiment de sécurité. Dans cette unité, nous verrons pourquoi et comment le stress peut nuire aux apprentissages, et les conditions logistiques pour favoriser un cadre de travail favorable.
L’idée selon laquelle le stress et les apprentissages ne font pas bon ménage est relativement intuitive et admise. Mais pourquoi ? Pour quelles raisons et sous quelles modalités est-ce que le stress peut entraver les apprentissages ?
Pour schématiser, le siège des émotions se situe au niveau cérébral dans le système limbique. Ce système, en lien avec le tronc cérébral, est fortement impliqué dans les réactions et comportements automatiques (ce qui est utile en cas de danger imminent). Il se distingue du cortex préfrontal, qui lui est le siège de compétences cérébrales supérieures, nécessaires aux apprentissages (planification, attention, mémoire, raisonnement complexes, etc.) et à la régulation des émotions. Ces différentes zones de notre cerveau se développent à des vitesses différentes, de l’arrière à l’avant. C’est pourquoi, chez les adolescent·es, le système limbique est mature avant qu'ils et elles ne soient pleinement capables de réguler leurs émotions.
Cette priorisation du limbique sur le cortex préfrontal est utile à notre survie. En effet, si une voiture nous fonce dessus, l’activation automatique du système limbique en lien avec le tronc cérébral aide notre corps à réagir vite, sans avoir besoin de passer par des circuits plus longs et complexes du raisonnement, qui sont situés à l’avant de notre cerveau. Mais pour les apprentissages, cela est peu efficace. Le stress et sa gestion vont entraîner une forte mobilisation de ressources cognitives, qui ne pourront pas être dévolues aux apprentissages.
Le système limbique, siège des émotions, est très lié à la mémoire émotionnelle. Ainsi, lorsque l’on ressent fortement une émotion, nous conservons un souvenir plus intense de cet événement, qu’il soit positif ou négatif (une fête d’anniversaire surprise comme l’annonce d’un décès).
Lorsqu’une personne ressent un fort stress en situation d'apprentissage, elle conserve alors l’événement et le stress associé en mémoire. Ainsi, si un ou une élève travaille en situation de stress, son cerveau apprendra rapidement cette association entre stress et apprentissage, et cela aura des répercussions à long terme. Il suffit de voir comment le simple fait de parler de mathématiques peut déclencher des émotions négatives fortes chez des adultes, qui sont pourtant loin du système scolaire depuis longtemps. Ils ou elles ont gardé des souvenirs intenses d’exercice de mathématiques, ce qui a contribué au fil du temps à développer une aversion quasi sensorielle pour cette discipline et des croyances du type « je suis nul·le en maths». La bonne nouvelle, c’est que comme tout apprentissage, il est possible d’apprendre quelque chose de nouveau.
En situation de stress, il arrive parfois d’avoir une sensation de « blanc», ou encore de «trou de mémoire». Cela s’explique en partie par le phénomène de focalisation interne.
Imaginez que votre attention est un gros projecteur comme on en trouve au théâtre. Au quotidien, quand vous faites quelque chose, votre projecteur éclaire la tâche sur laquelle votre attention se porte (focalisation externe). En revanche, si au cours d’une conversation vous êtes très stressé·e, votre projecteur va arrêter d’éclairer la personne et/ou la conversation et va projeter sur vous-même (focalisation interne). Vous allez soudainement vous concentrer sur votre tenue vestimentaire («suis-je bien habillé·e», «est-ce que ma braguette est fermée ?»), sur votre posture («est-ce que je dois mettre les mains à plat sur la table ?», «où dois-je poser mon regard ?»), sur ce que vous dites ou faites dans l’interaction («est-ce que je parle trop ?», «qu’est-ce que je vais dire après ?»).
Pendant ce temps, votre attention n’est plus du tout focalisée sur l’interaction (focalisation externe). Le projecteur attentionnel est braqué sur vous-même : vous êtes en focalisation interne. Il y a fort à parier que vous passiez à côté de la moitié des informations qui vous seront données à ce moment-là par votre interlocuteur, ou que vous perdiez alors le fil de la conversation. Ainsi, quand ce sera à votre tour de répondre… il y aura un blanc !
Ce phénomène se retrouve fréquemment dans les interactions sociales, comme lorsqu’un ou une enseignant·e donne une explication, mais également dans les situations d’évaluation, dans lesquelles on est tellement parasité·e par tout un cortège de pensées qui empêche de maintenir une focalisation externe (tournée vers le contrôle par exemple). À noter que toutes ces pensées sont très fugaces et pré-conscientes. Il est souvent très difficile de se rendre compte que l’on est en focalisation interne.
En comprenant les mécanismes sous-jacents qui font que le stress perturbe les compétences, je peux maintenir une position bienveillante auprès de mes élèves. Je peux favoriser la focalisation externe en faisant régulièrement des pauses dans l’explication et en sollicitant l’élève très fréquemment. Je peux lui poser des mini questions les plus faciles possibles, et le faire participer à chaque étape. En procédant ainsi, je lui permets de se focaliser à intervalles très réguliers sur la tâche, et donc de basculer de la focalisation interne vers la focalisation externe.
Afin de limiter le stress lors des séquences d’apprentissage, il est possible de mettre en place des rituels rassurants :
Il est essentiel de proposer des challenges aux élèves qu'ils et elles seront en mesure de relever afin d’augmenter le sentiment de compétences. L'enseignement doit être pensé comme une succession de scénarios qui montre aux élèves que l'on gagne à sortir de sa zone de confort. Pour cela :
Tout cela me permet de me rappeler d’où partent mes élèves, l’objectif à atteindre, mais également l’ampleur du travail que cela représente.
Je n’hésite pas à varier les différents types de tâches au cours d’une même séance. Au lieu de faire des séquences de cours longues, des séances complètes d’exercices :
Le plus de ce fonctionnement est qu’il permet de s'accorder quelques minutes de pauses réflexives à chaque changement de tâche, et d’alterner les temps d’écoute et les temps d’action.
Marie Gallé-Tessonneau
Docteure en psychologie et psychothérapeute.
Autrice du livre “Comprendre et soigner le refus scolaire anxieux. Psychothérapie de la phobie scolaire” Dunod, 2020
Fanny Duhamel
Professeure de Mathématiques depuis 2005.
Chargée de mission pour la CARDIE. Le bien-être à l'école est au cœur de ses pratiques enseignantes.
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