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Construire l'autonomie comme base de la continuité pédagogique : et si c’était l’occasion ?

Julia Barré
19 mars 2020 16:29
10 mn

Autonomie, vous avez dit autonomie ? De quoi parle-t-on ?


« L'autonomie est la faculté d’agir par soi-même en se donnant sa propre loi. »

Selon cette définition, si je suis autonome, je m’autorise donc à agir selon mes propres règles et ainsi à conduire ma vie. Mon autonomie est ainsi envisagée comme la capacité à identifier mes besoins, les nommer et ainsi choisir les comportements par lesquels je peux les satisfaire. 
Pour devenir autonome je dois donc prendre conscience de mes besoins, devenir conscient puis responsable de mes émotions. Dans le monde qui m'entoure, je suis autonome si je suis responsable de mes actes, si je suis responsable des conséquences de mes actes.

 

L’autonomie, ça se construit comment ?


Isabelle Fillozat a identifié 4 phases dans la construction de l’autonomie :

  • LA DÉPENDANCE

Dans cette phase, le tout-petit est totalement dépendant de sa mère. Il a besoin d'elle, il ne se sent en sécurité que lorsqu'il est près d'elle. Dès qu'elle s'éloigne, il a peur, peur d'être abandonné. 

En classe, l’élève dépend dans un premier temps de nous, de nos consignes, de nos attentes pour tout apprentissage scolaire. Attention, il est bien entendu que certains apprentissages n’ont aucun besoin de l’adulte pour se faire (marcher, parler par exemple).
 

  • LA CONTRE-DÉPENDANCE

Progressivement, l’enfant va se mettre à dire NON. Il entre dans une phase d'opposition systématique. Tant qu'il dit OUI à sa mère, il ne sait pas faire la différence entre son désir propre et celui de sa mère. Il ne sait pas s'il mange parce qu'il a envie ou s'il mange parce que sa mère a envie qu'il mange. Cette phase de contre-dépendance est une phase de recherche du désir propre, de l'individualité, de l'affirmation de soi, c'est une étape marquée par l’égoïsme.

En classe l’élève commence à dire, à manifester sa volonté de montrer son initiative. Il veut faire des propositions et ne pas faire que répondre à vos demandes.
 

  • L'INDÉPENDANCE

Un peu plus tard, vient le maître mot « TOUT SEUL » : l'enfant veut faire tout seul, il cherche à explorer ses possibilités. Pour devenir un individu autonome, il a besoin de tester ses limites, de savoir ce dont il est capable seul. Il refuse pendant cette période l'aide ou même le contact des autres qui lui donnent l'impression de l'emprisonner. Il quitte les liens et apprend la liberté. Il veut être indépendant.

Dans la classe, l’élève refuse votre aide. Il manifeste son agacement quand aucun choix ne lui est proposé. Il veut montrer qu’il a grandi, dans son comportement, dans son apprentissage, dans sa maîtrise du savoir jusqu’à rencontrer une nouvelle difficulté…

 

  • L’INTERDÉPENDANCE

L’enfant, dans cette phase, sent à nouveau le besoin de contact et le demande. Il est devenu capable de s'exprimer et de demander parce qu'il a appris à reconnaître son désir, parce qu'il sait qu'il existe en tant que personne et parce qu'il est libre. Il entre dans la phase d'interdépendance.

En classe, l’élève rencontrant une difficulté est capable de demander de l’aide. Il ne sent pas prisonnier de vous, il interagit.

On voit comment ces 4 phases sont traversées par tout individu de 0 à 99 ans (on peut encore après) dans tout apprentissage. Une boucle sans cesse recommencée.


Comment définir un protocole de travail pour vos élèves et comment regrouper et leur partager des ressources ?

Découvrez Guide Pratique Êtreprof et ses 10 fiches pour vous outiller concrètement face à la continuité pédagogique

 

Pour devenir autonome à l'école 

 

Être autonome à l’école, qu’est-ce que cela sous-entend ? Qu’entendons-nous par enfant autonome au sein de l'école ?

Être autonome à l’école, c’est développer des compétences qui permettent de mobiliser des savoirs, savoir-faire et savoir-être pour réaliser seul une tâche.


Quelles sont les compétences mobilisées pour devenir autonome dans les tâches scolaires ?

Philippe Merieu a défini ces compétences. On pourra s’appuyer sur cette catégorisation pour savoir ce qu’on pourrait accompagner au sein de nos classes et plus particulièrement dans cette période de travail à distance. Une première série qui peut être travaillée / accompagnée / construite à distance : 

  • Organiser son environnement,
  • Lire des consignes et les comprendre,
  • Se fixer un objectif, trouver les moyens pour y parvenir et évaluer le résultat,
  • Organiser son travail, les étapes nécessaires à la réalisation de la tâche demandée,
  • Surmonter une difficulté et pas seulement par le recours à l’adulte mais en revenant en arrière, en cherchant le renseignement au bon endroit, en consultant un document, un dictionnaire,
  • Mener une recherche, en faire un brouillon, le relire avec distance. Puis le reprendre, l’amender, le recomposer…,
  • Se mettre au travail en l’absence de leur professeur.

 

Les compétences ci-dessous seront développées plus tard au sein de la classe, car votre présence, votre médiation, votre expertise pédagogique sont nécessaires :

  • Analyser un échec. Chercher pourquoi telle ou telle méthode n’a pas été efficace et ainsi de mettre en place de nouveaux moyens pour réussir.
  • Apprendre et savoir quand on sait. Avoir des indications qui permettent de contrôler soi-même ses apprentissages.
  • Choisir des partenaires de travail.
  • Écouter, non pour renoncer à soi-même, mais pour se confronter à l’autre.
  • Prendre la parole, être compris et convaincant.

 

Une petite méthode pour penser le travail afin qu'il puisse être réalisé en autonomie


Quelques points de vigilance avant tout : 

  • Construire l’autonomie de vos élèves à distance, c’est, au moins pour les plus petits, accompagner les parents dans cette construction. Il vous incombera ainsi d’être explicites sur la place que vous souhaitez et que vous ne souhaitez pas qu’ils aient dans l’activité de leurs enfants.
  • N’oubliez jamais que les parents ne sont pas enseignants, qu’il sont sûrement beaucoup d’autres choses à faire et que certains ne peuvent tout simplement pas accéder à votre langage écrit.
     

⇒ Finalement le contrat de cette continuité pédagogique ne devrait-il pas être passé entre VOUS et vos élèves ? Vous proposez des activités pour maintenir un lien avec l’école mais l’école, telle qu’elle se fait au sein des murs, ne peut être celle conduite hors les murs. Il nous appartient, bien inconfortablement, d’imaginer autre chose, autrement. 

Pour illustrer ce contrat, imaginez-vous dans votre classe. Lorsque vous proposez du travail, il ne vous viendrait pas à l’esprit d’appeler tel ou tel parent pour lui dire de demander à vos élèves de travailler ? Non, vous trouvez une manière de passer un contrat didactique avec vos élèves. Reste à inventer, oser une manière de passer ce contrat à distance. Les parents ne seront là que pour rappeler à leurs enfants qu’ils ont un contrat avec vous. 

Personnellement, j’imagine un coup de fil régulier (si vous voulez appeler en “masqué”, il suffit de composer #31# avant votre numéro) pour rappeler l'enfant à l’activité, savoir comment ça se passe, pourquoi rien n’est fait si besoin.

 

Une méthodologie en 3 points

Pour construire des propositions qui peuvent se réaliser en autonomie, vous pourrez expliciter 3 temps de vos activités : AVANT /  PENDANT / APRÈS.

  • Penser le AVANT, c’est penser au matériel nécessaire, c’est penser aux consignes, et à la manière d’entrer dans la tâche.
  • Penser le PENDANT, c’est penser la méthodologie à utiliser, c’est penser aux gestes mentaux qui seront utiles. Pour vous aider, imaginez vos élèves en train de travailler, identifiez les freins qu’ils peuvent rencontrer.
  • Penser l’APRÈS, c’est penser à la manière de sortir de la tâche, c’est donner les indicateurs qui font dire qu’un travail est terminé.

 

Une fois l’activité pensée, il faudra EXPLICITER votre pensée à vos élèves. Pour cela :

  • Trouver une manière de présenter les choses de façon ritualisée : couleurs/typo, encadrés, pictos…
  • Expliciter les consignes/étapes/sortie de tâche
  • Expliciter si nécessaire dans un encadré par exemple le lexique nécessaire, un rappel, un indice…
  • Expliciter le temps qu’il faudra passer sur la tâche
  • Expliciter ce que vous attendez du travail
  • Expliciter ce qui déterminera un travail “réussi”

 

Ces explicitations doivent se suffire à elles-mêmes. Les parents (s’ils sont disponibles, s’ils parlent français, etc.) ne seront que les médiateurs de votre consigne, de votre mise en activité.

Et puis, pourquoi pas, dans vos propositions avoir un petit encart destiné aux parents (qui peuvent prendre trop de place car voulant bien faire) qui expliciterait :

  1. ce qu’ils ont le droit de faire
  2. ce qu’ils n’ont pas le droit de faire

 

N’hésitez pas si besoin à “recadrer” leur intervention quand par exemple vous la devinez dans les rendus de vos élèves !

Un bien bel enjeu que cette autonomie non ?


Nathalie, pilote pédagogique EtrePro et instit pendant 25 ans, et Sara, PE depuis 17 ans, fondatrice du groupe Facebook Prof épanoui/ssant·e

Pour revoir l'échange en direct entre Sara et Nathalie sur l'autonomie et confinement, le replay est disponible ici !

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