Nous l’apprenons grâce aux neurosciences cognitives : l’attention, l’un des piliers de l’apprentissage, est un processus qui s’acquiert progressivement chez l’enfant. Elle est une fonction cognitive au service de toutes les autres, qui se développe tout au long de sa scolarité. C’est donc une méprise que de demander aux élèves d’être attentifs et attentives alors que l’on ne leur a pas appris.

Pour Stanislas Dehaene, l’attention est l’un des quatre facteurs de réussite de l’apprentissage, avec l’engagement actif, le retour d’information et la consolidation. Elle est également le levier majeur de la mémorisation. S’il n’y a pas d’attention, il n’y aura pas de mémorisation, donc pas d’apprentissage. 

Il est important de savoir que l’attention peut être utilisée de différentes façons. Un document provenant de l’académie d’Orléans nous permet de définir trois types d’attention :

• L’attention soutenue, mobilisée par des tâches qui exigent un fort niveau attentionnel pendant plusieurs minutes. C'est typiquement le cas lorsqu'on apprend quelque chose de complexe. Elle demande de la vigilance et un équilibre attentionnel développé.
   
• L’attention sélective, aussi appelée l’attention dirigée, est orientée vers une seule et même tâche. Elle occulte les autres, le cerveau filtrant alors les stimuli extérieurs - un message, par exemple. C’est pour cette raison qu’un ou une élève qui lit un texte attentivement peut parfois ne pas entendre la consigne suivante.
   
• L’attention partagée consiste à faire plusieurs tâches en même temps (ces tâches ne pouvant en aucun cas utiliser les mêmes circuits et les mêmes neurones). Je peux en effet écrire et écouter en même temps, mais il est impossible de lire et écrire exactement au même moment, car ces deux actions utilisent les mêmes circuits dans le cerveau.
   

L’attention est un processus actif limité de sélection dans un flux incessant de stimuli. Elle est liée à nos perceptions de chaque instant. La concentration est un “concentré d’attention” sur un temps donné avec une intention précise, une cible pour réduire la fluctuation de stimuli. Éduquer à l’attention, outiller les élèves pour avoir une compréhension de l’attention est utile pour comprendre le processus de l’apprentissage et optimiser les stratégies proposées à nos élèves.

Dans une classe, les sources de distraction visuelles et auditives sont nombreuses : de multiples affichages, un bruit de fond constant, etc. Pour réduire ces distractions, l’enseignant ou l’enseignante peut veiller à un affichage minimaliste sur les murs de la classe (il est possible d’avoir des traces mémorielles collectives sous d’autres formes : sous forme de penderie sur des cintres, sur des cahiers de mémorisation à disposition, des fiches méthodologiques, etc.). 

Pour réguler le bruit sonore, il est possible d’utiliser des outils comme une batterie sonore, ou la mise en place de rituels de mise au calme), mise en œuvre à installer avec les élèves.  L’apprentissage de l’auto-régulation de leur attention leur permet de comprendre pourquoi il est important de créer un climat de classe où chacun et chacune puisse travailler, évoluer dans le calme. Calme ne veut pas dire silence total : des nuances sont à apporter (selon les modalités organisationnelles), explicitées aux élèves. Autre source de distraction : les élèves qui ont fini leur travail, leur activité avant les autres. Pour ces élèves, prévoir des activités autonomes, organiser sa classe en tenant compte des différents rythmes de travail.

L’enseignant ou l’enseignante est un modèle que les élèves imitent. Comment demander aux élèves de parler sans crier, si soi-même, on a une voix forte et que l’on ne veille pas à la moduler ? De plus, le non-verbal est à plus de la moitié une composante de notre communication (Haggard et Isaacs, 1966 ; et Jean-Claude Abric, “Psychologie de la communication”, 2019). Se déplacer dans la classe, avoir une attention visuelle auprès de ses élèves est aussi une astuce pour maintenir leur attention.

Il est difficile de maintenir une attention constante. Il est donc important d’intégrer dans son emploi du temps des pauses, des rituels comme mentionnés précédemment. J’avais des élèves du CE2 au CM2 il y a quelques années qui se démobilisaient rapidement, rangeaient difficilement. Des comptines chantées en anglais établissaient un rituel de transition apprécié. Des rituels de mise au calme aident également les élèves à réguler leur attention : des exercices de méditation de pleine conscience, comme on trouve dans l’ouvrage “Calme et attentif comme une grenouille “ d’Eline Snel, des exercices de cohérence cardiaque, etc.

Lorsque l’on demande aux élèves des tâches cognitives nombreuses et importantes, cela leur demande de mobiliser en mémoire de travail plusieurs informations qu’il n’est pas toujours facile de traiter et peut représenter une surcharge. Des consignes explicites, des supports proposés clairs (schémas, documents, etc.) sont aussi à penser pour minimiser une surcharge cognitive. Les rétroactions qu’apportent l’enseignant·e sont également importantes pour maintenir l’attention et engager les élèves.

Installer une communication bienveillante permet d’améliorer le climat de classe, d’établir des relations sereines et empathiques (être à l’écoute des besoins des un·es et des autres) et de pouvoir réajuster ce qui peut nuire aux apprentissages. Je me rappelle avoir vu dans une classe une affiche avec le mot “perturbateurs”, où étaient inscrits les prénoms des élèves qui distrayaient la classe ou faisaient du bruit. Les élèves étaient certes averti·es voir sanctionné·es, mais qu’est-ce que cela changeait ? Avaient-ils et elles appris à faire autrement ? Pourquoi ne pas s’interroger plutôt sur la nature de ces distractions, externes et internes, et sur les besoins de l’élève, en termes de gestion de classe, pour réduire ces distractions ?

La variation des activités et supports dans la conception d’une séquence pédagogique est fondamentale pour motiver, engager et capter l’attention de l’élève dans une activité. Nous avons vu précédemment que pour qu’il y ait apprentissage, il faut à la base de l’attention, de la mémorisation mais aussi de l’implication, l’engagement actif de l’élève. Sylvain Connac a détaillé les sept phases pour apprendre dans la construction d’une séance pédagogique : 

• l’attention ;
• l’expression ;
• les confrontations ;
• l’incertitude ;
• la transmission, la rétroaction ;
• la mémorisation ;
• le transfert.
   

Réfléchir à engager l’élève dans une situation d’apprentissage par un questionnement, un défi, une résolution de problème va permettre de l’engager activement et maintenir son attention. 

Pour conclure, capter l’attention de ses élèves est un enjeu pour la construction des apprentissages. Comprendre le processus de l’attention et se questionner sur les stratégies à mettre en œuvre pour réduire les sources de distraction internes et externes permettent de créer un environnement d’apprentissage engageant pour les élèves.