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6 stratégies pour installer l’autonomie des élèves à l’entrée au collège

Christine Bourkache
2 juillet
5 mn

L’autonomie scolaire est souvent définie comme la capacité à savoir faire seul, sans l’adulte.
Le chercheur Philippe Meirieux nous met en garde : « L'autonomie n'est pas un don ! Elle ne survient pas par une sorte de miracle ! Elle se construit dans la rencontre d'éducateurs capables d'articuler, dans leurs préoccupations, une meilleure définition de leur domaine de compétences, une plus grande lucidité sur les valeurs qu'ils veulent promouvoir et un meilleur discernement du niveau de développement de l'enfant et des apprentissages qui peuvent lui permettre de progresser. » 

Il insiste ainsi sur la nécessité de mettre en tension autonomie de l’élève ET accompagnement par l’enseignant ou l'enseignante. Ce sera notre fil conducteur tout au long de cet article.

Stratégie 1 : Créer en classe un réseau de conditions favorables à l’autonomie

La pédagogie développée par Maria Montessori vise explicitement le développement de l’autonomie de l’enfant : pensez au titre du livre Apprends-moi à faire seul ! de Charlotte Poussin. Quels sont les principes de cette pédagogie que pouvons-nous transférer dans nos pratiques de classe ?

  • Pour faciliter l’autonomie fonctionnelle, l’adulte organise des espaces d’apprentissages et d’enseignements adaptés aux élèves et qui favorisent la liberté d’action et le repérage (par des aires définies, dédiées à une fonction).
     
  • L’adulte est facilitateur de la quête d’autonomie, en accompagnant la dimension émotionnelle. Il accueille, reconnaît, nomme, respecte les besoins de l’enfant (rythme, centre d’intérêt, écoute bienveillante des demandes, etc.). 
     
  • L’adulte veille à proposer des activités qui stimulent chez l’enfant la curiosité et le désir d’apprendre.
     
  • Chaque apprenant est à la fois donateur et destinataire de connaissances, car l’apprentissage est un acte social.
     
  • « La main est le reflet du cerveau. » : on peut maximiser les apprentissages par l'expérimentation et la manipulation.
     
  • Utiliser du matériel progressif, auto-correctif pour permettre à l’élève de s’exercer autant que de besoin à la tâche de manière autonome.
     
  • Individualiser et personnaliser le cursus scolaire à l’aide de plans de travail, de ceintures de compétences, etc.
     

Stratégie 2 : Enseigner plus explicitement

Rendre explicite les apprentissages, c’est expliquer aux élèves le pourquoi (les compétences et connaissances que l’on vise), le comment (tâches, procédures et stratégies), et c’est aussi institutionnaliser les apprentissages réalisés

« La qualité de l’enseignement, c’est la qualité de l’apprentissage. » Pour ce faire, Steve Bissonnette nous propose une scénarisation didactique et pédagogique menant à plus de clarté pour les élèves :

  • Phase de modelage : « I do it », l'adulte montre aux élèves comment exécuter l’habileté après avoir enseigné les concepts et les règles.
  • Phase de pratique dirigée ou guidée : « We do it », l'adulte guide les élèves dans l’exécution de l’habileté.
  • Phase de pratique autonome ou indépendante : « You did it », les élèves exécutent la compétence sans l’aide de l'adulte.

 

Dans cette modélisation de la séquence pédagogique, l’étayage est levé de façon très progressive et conduit à l’autonomisation de l’élève. Dans son dossier ressource, le centre Alain Savary nous propose ce tableau de synthèse sur l’enseignement explicite :

Stratégie 3 : Consacrer du temps en classe à la méthodologie

Apprendre à apprendre, c’est donner aux élèves les outils et les méthodes pour construire leurs connaissances. Si la capacité à apprendre est innée de part la nature même de notre cerveau, comment peut-on apprendre si on ne sait pas comment s’y prendre ?

Le domaine 2 du socle commun implique que « les méthodes et outils pour apprendre doivent faire l'objet d'un apprentissage explicite en situation, dans tous les enseignements et espaces de la vie scolaire ». La maîtrise des méthodes et outils pour apprendre développe « l'autonomie et les capacités d'initiative et favorise l'implication dans le travail commun, l'entraide et la coopération ».

Du point de vue des neurosciences, en effet, les 4 piliers de l’apprentissage (Stanislas Dehaene) à soutenir chez nos élèves sont :

  • L’attention : elle est sélective, l’élève doit donc savoir ce à quoi il ou elle doit faire attention. L'adulte doit hiérarchiser pour l’élève les informations.
  • L’engagement actif : pour apprendre efficacement, les élèves doivent être en action.
  • Le retour sur l’erreur : l’erreur est bénéfique si l’élève comprend pourquoi il ou elle s’est trompé·e. L'adulte (ou le matériel lui-même, s’il est auto-correctif) fournit à l’élève le retour d’information (feedback en anglais) qui lui permet de dépasser son erreur.
  • La consolidation : le rappel mnésique des notions ou des procédures doit être effectué de façon régulière pour garantir leur automatisation.


Pour aller plus loin, je vous invite à consulter l’ouvrage de Grégoire Borst, Émilie Decrombecque, et Jérôme Hubert : Enseigner aux élèves comment apprendre (éditions Léa.fr).

Stratégie 4 : Moduler l'aide de l’adulte et réduire la dépendance

Un élève non dépendant est un élève qui fait le choix de ne pas solliciter l’aide de l’adulte (il ou elle n’en ressent pas le besoin) et qui se met en action pour répondre à une consigne. Toute aide inutile est une opportunité d’apprentissage qui se perd. Il est donc, de mon point de vue, intéressant de travailler sur les processus de régulation de la décision du recours à l'aide de l'adulte.

Le Tétra'aide conçu par Bruce Demaugé avait pour objectif initial de maximiser l’activité des élèves. Mais il offre aussi la possibilité de rendre nos élèves plus autonomes en réduisant leur degré de dépendance à l’adulte

Concrètement, il n'y pas d'élève qui reste dans l'inactivité, car selon le positionnement du Tétra’aide : 

  • L’élève peut être en train d’avancer dans son travail, tout va bien pour lui (sommet vert, réduction par « dépollution », on laisse à l’élève le plus d’indépendance possible).
     
  • L’élève a sollicité une aide non urgente, mais avance dans son travail en attendant (sommet jaune, réduction directe ou assistée, mais qui peut aussi se résoudre par une délégation à un autre élève).
     
  • L’élève aide un ou une camarade ; ou se fait aider par un ou une camarade, ou par l'adulte (sommet bleu, la réduction de la dépendance est déléguée).
     
  • L’élève est bloqué dans son exécution, mais agit immédiatement en demandant une aide urgente (sommet rouge, réduction de la dépendance directe ou assistée).

Stratégie 5 : Travailler en pédagogie de projet

La pédagogie de projet est un modèle d’enseignement qui laisse une plus grande place à l’élève. Le choix du projet à réaliser revient en principe aux élèves, parfois même en fonction de leurs centres d’intérêt. Cela réhausse de manière significative leur motivation pour apprendre

L'enseignant ou l'enseignante ne dicte pas la démarche à suivre, mais adopte une posture de facilitateur. Il ou elle encourage l’élève à atteindre les savoirs par lui-même. 

L’élève fait preuve d'initiative et d’autonomie, fait des choix et partage avec son équipe la responsabilité de la réussite du projet. L’élève devient acteur-auteur, selon l’expression de Jean-Pierre Boutinet (Grammaires des conduites à projets, 2010.) En réalisant un projet, l’élève ne fait pas que mobiliser ses savoirs, il ou elle les réorganise pour en construire de nouveaux.

Stratégie 6 : Créer une table d’appui dans sa salle de classe

La table d’appui est un dispositif pédagogique pensé par Battut et Bensimhon (2006). Sa mise en œuvre est simple et peu coûteuse pour l’enseignant ou l'enseignante, et constitue une pratique quotidienne de différenciation pédagogique pour soutenir, adapter et prolonger les notions abordées lors des séquences d’apprentissage.

Concrètement, on matérialise une table d'appui dans la salle de classe. Les élèves sont invités à s’y rendre pour trouver :

  • des ressources complémentaires (cours, manuels, fiches d’aide, calculatrice, etc.) ;
  • une entraide ou un tutorat des élèves sur la table d’appui qui expliquent ce qu’ils ou elles ont compris (et reçoivent potentiellement en retour de l’aide sur d’autres points bloquants) ;
  • une explicitation et une méthodologie supplémentaire : l’enseignant ou l'enseignante se rend disponible pour faire verbaliser par l’élève ses difficultés, explique les savoirs essentiels et opère un retour sur les automatismes et procédures nécessaires pour réaliser la tâche.
     

Lorsque des élèves rejoignent l’enseignant ou l'enseignante à la table d’appui, le reste des élèves doit être en mesure de travailler dans un mode autogéré. Tous les élèves sont susceptibles, à un moment de la journée ou de la semaine, de travailler autour de la table d’appui. 

 

Christine Lebeau-Bourkache, enseignante spécialisée et formatrice école inclusive

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Commentaires

  • Hervé Cyrille — 25 juin 2022 08:40

    Merci beaucoup pour ce contenu. Je l'ai trouvé très pratique et aussi très riche pour développer l'autonomie des apprenants.

  • Anne-Laure — 28 juin 2023 23:44

    Merci beaucoup. C’est très intéressant et cela donne envie d’innover. Je souhaite mettre en place des plans de travail pour accompagner les élèves vers plus d’autonomie.

  • dani — 29 juin 2023 12:15

    merci infiniment

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