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Comment expliciter son fonctionnement pour prendre en main sa classe sereinement ?

Ketty Joly
8 octobre 2021 16:32
3 mn

« L’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde. » Nelson Mandela

Si l'intention de cet article est de vous donner des pistes pour prendre en compte les adolescents qui évoluent au sein de notre institution scolaire, ne vous méprenez pas. Il ne s'agit pas de vous livrer une to-do list dans laquelle il est question de : « Il n'y a qu'à… » ou « Il faut que… ». Ce que je souhaite, c'est vous aider à réfléchir à ce que vous avez envie de mettre en place pour que cette année scolaire se déroule au mieux, pour vous et pour vos élèves. Mon souhait est donc, que ces quelques lignes vous engagent dans une réflexion personnelle à savoir : quel·le professeur·e avez-vous envie d'être

Dans cette perspective, vous serez amené·e à penser votre posture professionnelle et la relation bienveillante que vous entretiendrez avec vos élèves, ces adolescents : êtres en devenir.

Pour ce faire, j'ai retenu 10 items que je vous partage et je vous invite à prendre ce dont vous avez besoin :
 

1. Se connaître 

 
« Connaître les autres, c'est sagesse. Se connaître soi-même, c'est sagesse supérieure. » Lao Tseu

Avant de démarrer votre année scolaire, il me semble pertinent de commencer par vous poser la question de vos besoins. De quoi avez-vous besoin pour que cette année se passe au mieux ? Nommez-les et écrivez-les. Une fois que ces besoins seront clairement identifiés, il vous sera plus aisé de déterminer vos objectifs, les moyens pour y parvenir et d'identifier vos points faibles ou, du moins, les points pour lesquels vous auriez besoin d'être accompagné, épaulé
 

2. Accueillir les élèves

« Il est des rencontres fertiles [...]. Elles [...] simplifient et allègent l’entente avec soi-même. » Correspondances entre René Char et Albert Camus dans « Pour nos ados, soyons adultes » de Philippe Jeammet 

Dans le cas qui nous intéresse ici, accueillir signifie recevoir vos élèves dans de bonnes conditions. Pour cela, il est nécessaire de réfléchir à l’autorité bienveillante que vous souhaitez mettre en place dans votre classe. Il vous appartiendra de trouver où placer le curseur. La participation des élèves est un atout ; aussi de façon collective, impliquez les élèves dans cette entreprise. Demandez-leur ce dont ils ont besoin pour que cette année se passe au mieux, pour eux, et déterminez collectivement les points essentiels permettant l'exercice de votre enseignement.
En début de chaque année scolaire, je prends le temps de passer dans les classes que j'ai en responsabilité en tant que CPE, afin de proposer un temps d'accueil à mes élèves. Je commence par un jeu pour connaître leurs prénoms (ce qui facilite aussi l'intégration entre eux), puis je vérifie leur objectif et le sens de leur présence (obtenir mon bac, avoir une orientation choisie...). À partir de là, je les fais parler du cadre nécessaire à cette réussite en les questionnant sur ce qu'ils ont envie de faire pour y parvenir. 
Je rappelle aux élèves que cette année ne sera sûrement pas un long fleuve tranquille mais qu'il y a des personnes dans l'établissement (citées plus bas) qui sont là pour les écouter et les accompagner... Enfin je conclus par une discussion à partir de citations comme celle de Michael Jordan : « Certains veulent que ça arrive. D’autres aimeraient que ça arrive. Et les autres font que ça arrive. »

 

3. Dire ce que vous faites et faire ce que vous dites

« L'autorité n'est pas - quoi qu'on en dise - tout ce qui fait obéir des gens. Elle n'est pas le pouvoir et elle ne se réduit pas davantage à n'être qu'un instrument du pouvoir, "une augmentation" de la domination, même si le pouvoir prend souvent le masque de l'autorité. Elle n'a précisément pas besoin de s'affirmer sur le mode "autoritaire". Telle est la première confusion qu’il importe de dissiper et qui n'appartient pas au sens commun. » Myriam Revault d'Allonnes, le Pouvoir des commencements : essai sur l'autorité, Le Seuil, 2006 tiré de l'ouvrage L'autorité expliquée aux parents de Claude Halmos.

Vos élèves sont des êtres à part entière, des êtres en construction qui ont besoin pour se construire de l'autorité des adultes et des limites qu'ils leur mettent. Il est donc fondamental de leur expliquer les règles de la classe, celles de l'école et de leur imposer de les respecter. Mais comme le précise C. Halmos « dans le but qu'ils deviennent capables de les respecter d’eux-mêmes sans que l'on soit sur leur dos… non par soumission... mais parce qu'ils auront compris le sens et l'intérêt ».

Établissez vos règles de fonctionnement avec objectivité (pensez-vous que zéro pour des bavardages est réellement possible, et si oui, qu’est-ce que cela signifie ?). Exposez vos exigences en les justifiant, si possible en vous référant à celles attendues en milieu professionnel, proposer des stratégies pour garantir le cadre. 
Exemple : « Pour travailler, j'ai besoin d'un minimum de calme dans la classe. J'ai bien conscience qu'il pourra y avoir partiellement quelques échanges entre vous, alors je vous propose de notifier au tableau un code afin de vous avertir que le niveau sonore doit diminuer. Je pense aussi que cette régulation est nécessaire pour tous les élèves qui ont besoin de rester concentrés pour réussir. »

Expliquez également votre réaction quand ce cadre de travail n’est pas tenu. Il ne s'agit pas ici d'évoquer une liste de punitions telles que « Si tu fais si, tu auras cela. » Il s’agit plutôt de rappeler la règle et la nécessité de revenir à votre accord collectif, puis de permettre à l'élève dissipé de réfléchir à son attitude à l'écart du regard des autres.

Faites un temps d'ancrage : rappelez que si vous prenez ce moment, c'est pour que les choses soient claires pour tout le monde puisque votre seul objectif est que tout se déroule au mieux pour eux et pour vous. Vous pouvez, le cas échéant, demander à un élève de reformuler.

Cette réalisation s’inscrira dans la continuité de l’application du règlement intérieur de votre établissement (il existe des diversités d’un établissement à l’autre, donc pourquoi ne pas l'imprimer pour l'afficher dans vos salles et dans votre cahier). Connaître la règle permet de mieux la faire appliquer et d’anticiper sur certaines gestions de situations. Les Conseillers Principaux d’Éducation (CPE) et professeurs principaux peuvent être des personnes ressources.
 

4. Être à l'écoute

« Écouter quelqu'un, c'est lui permettre d'entendre ce qu’il me dit. » Jacques Salomé

Nous l'avons vu plus haut : les adolescents sont des êtres en construction. Ils tiennent pour vrai ce qu'ils ont vécu de leur point de vue. La plupart du temps, ils partent du principe que ce qui leur arrive est injuste parce que la personne qui va les recadrer leur en veut ou ne les aime pas... Dans ce contexte, il est important de garder votre calme, de laisser les élèves exprimer leurs ressentis et de les écouter, sans les nier. Mais écouter ne signifie pas tout accepter. La règle reste votre fil conducteur. 
Cependant, les enseignants ne voient pas toujours tout ce qui se passe dans la classe : la prise en compte du vécu de l'élève est salutaire, notamment quand un élève explose à force d'avoir été titillé par un autre... Se renseigner sur le climat entre eux, de temps en temps, peut éviter de passer au travers de conflits qui éclatent pendant le cours. Les délégués de classe peuvent jouer un rôle important de veille. Enfin, il est important de se rappeler « qu'un adolescent insupportable est un adolescent en difficulté. Il faut essayer de trouver en l'écoutant où se situent ses difficultés. » (extrait de L'autorité expliquée aux parents de Claude Halmos)
 

5. Croire en leur potentiel

« Dès que les professeurs commencèrent à le traiter en bon élève, il le devint véritablement : pour que les gens méritent notre confiance, il faut commencer par la leur donner. » Marcel Pagnol, Le temps des amours

Il existe plusieurs théories (dont celle de l'effet Pygmalion) qui consistent à penser que le regard positif, les attentes et les croyances en la réussite des élèves d’un enseignant envers ses élèves, leur permettent d’améliorer leurs performances. Autrement dit, le simple fait de croire en leur potentielle réussite et de leur communiquer cette croyance, peut les conduire au succès. Intéressant, non ? En effet, il est question du principe selon lequel un enseignant qui a une attente bienveillante va mobiliser un certain nombre d’attitudes verbales (encouragements) et non verbales (regards, sourires…) lesquelles conduiront les élèves à acquérir les compétences visées

A contrario, lorsque les attentes sont négatives (l’effet Golem), les difficultés s’intensifient et on assiste à une diminution de l’estime de soi et du sentiment d’efficacité personnelle des élèves. Cette théorie montre les croyances limitantes envers nos élèves, qui peut les conduire à de moins bonnes performances.

On voit comment la perception des capacités des élèves par leurs enseignants influe sur leur comportement et donc agit sur leurs performances !

Cela étant, il importe de rappeler, comme le précise Philippe Meirieu, que si tout le monde est apte à apprendre et à réussir, tout le monde n’apprend pas. Ce que je tiens à préciser, c’est donc que si à l’impossible nul n’est soumis, il appartient à chacun d’y croire au départ. « L’éducabilité est d’abord le principe “logique” de toute activité éducative : si l’on ne postule pas que les êtres que l’on veut éduquer sont éducables, il vaut mieux changer de métier. »
 

6. Développer le vivre ensemble 

« Le rôle de l’école est d’intégrer un petit d’homme dans la communauté humaine, de transformer un individu en une personne. Répétons-le : éduquer c’est e-ducere, c’est conduire un jeune hors de lui-même, le faire exister dans les échanges qu’il vit avec les autres. » Albert Jacquard

La réunion de plusieurs individus au sein d’un même groupe, dans une classe, on le sait engendrera tensions et conflits. Si le conflit est inhérent à la société, il peut être intéressant de réfléchir à la façon de le prévenir au sein de votre classe. Il existe plusieurs techniques qui apprennent aux élèves à communiquer, en tenant compte de leurs émotions et ressentis face à une situation. Le processus de Communication Non Violente, introduite par Marshall Rosenberg, repose sur une pratique du langage qui renforce notre aptitude à conserver nos qualités de cœur, même dans des conditions éprouvantes. Elle n'innove pas et tous ses principes sont connus depuis des siècles.

La CNV nous engage à reconsidérer la façon dont nous nous exprimons et dont nous entendons l'autre. Les mots ne sont plus des réactions automatiques mais deviennent des réponses réfléchies, émanant d'une prise de conscience de nos perceptions, de nos émotions et de nos désirs. Nous nous exprimons alors sincèrement et clairement, en portant sur l'autre un regard empreint de respect et d'empathie. La technique des messages clairs, très proche des principes de la CNV, permet également d’introduire un échange verbal au service de la résolution non-violente des conflits entre pairs. Le message clair décrit ce qui s’est passé, explique les émotions et sentiments engendrés par la situation et formule une demande claire à l’interlocuteur. Chacun peut donc s’en sortir « la tête haute ».

Instaurer des temps d’échanges (utiles à l’apprentissage), où l’argumentation est centrale dans la classe, permet également d’apprendre à adopter un ton clément, à dissiper les malentendus et à évacuer les tensions.

Enfin, certains enseignants ont mis en place des chartes de bon fonctionnement construites avec la classe. Elles présentent l’intérêt de la co-construction (apprendre à se connaître, à accepter les différences, connaître ses besoins et tenir compte de ceux des autres, de ses limites…), de la nécessité de la règle et de l’acceptation.
 

7. Tenir compte des émotions de vos élèves 

« Les émotions non exprimées ne meurent jamais. Elles sont enterrées vivantes et libérées plus tard de façon plus laide. » Sigmund Freud

Ces derniers temps, il est beaucoup question d’apprendre à tenir compte de la gestion des émotions non seulement des élèves, mais également des enseignants car « un prof heureux peut changer le monde » (Thích Nhất Hạnh).

Une fois de plus, prendre le temps d’observer ce qui se passe en nous me semble être déterminant pour nous permettre de mieux faire face aux réactions émotionnelles de nos élèves. Prendre en compte les émotions des uns et des autres, c’est permettre une meilleure communication et placer les élèves dans de meilleures conditions d’apprentissage.
 

8. Faire preuve de gratitude 

« À certains moments de notre vie, notre propre lumière s'éteint et se rallume par l'étincelle d'une autre personne. Chacun de nous a des raisons d'éprouver une profonde gratitude pour ceux qui ont rallumé la flamme en nous. » Albert Schweitzer

Prendre le temps de remercier un élève pour le sérieux de l’exposé qu’il vous a présenté, exprimer sa gratitude devant la volonté affichée de la classe de s’accrocher face à une notion complexe par exemple est un bon moyen de développer une relation pédagogique sereine. Comme le décrit Florence Servan Schreiber, ces instants vous permettront de « savourer ce qui se passe, de ne pas considérer que tout est dû ou normal et savoir percevoir l’intensité du présent ». Ils créeront également une réaction émotionnelle positive chez les élèves concernés qui ont besoin de cette reconnaissance de l’adulte pour mieux se construire
 

9. Encourager les élèves 

« Un mot d'encouragement après un échec, vaut plus qu'une heure d'éloges après un succès. » André Stern

Il y a des phrases simples comme « Ça va aller », « Je suis certain·e que tu vas y arriver », « J'ai vu que tu avais travaillé », qui peuvent faire la différence, parce que c'est lorsqu'ils sont en difficulté que la confiance de nos adolescents en eux, est mise à l'épreuve et qu'ils ont besoin d'être valorisés.
 

10. Faire au mieux 

« Si vous faites de votre mieux, vous vivrez votre existence intensément. Vous serez productif, vous serez bon envers vous-même, parce que vous donnerez à votre famille, à votre communauté, à toute chose. C’est dans l’action que vous serez intensément heureux. Lorsque vous faites toujours de votre mieux, vous passez à l’action. Faire de votre mieux signifie agir parce que vous en avez envie, et non parce que vous attendez une récompense. » Les 4 accords toltèques de Don Miguel Ruiz

Ces pistes de réflexions ne sont pas normatives car nous savons bien que, selon certaines situations, il y a des pratiques qui fonctionnent et d'autres non. Je crois simplement et humblement que si chacun fait de son mieux, nous serons en mesure d’exercer nos métiers dans des conditions optimales.
 

J’ai débuté cet article en vous annonçant mon intention : vous proposer un certain nombre de réflexions sur votre pratique, sur l'enseignant que vous souhaitez être, sur ce que vous souhaitez mettre en place. J’ajouterai que si je pense qu’il appartient à chacun·e de faire sa place, vous n’êtes pas seul·e dans les établissements. Ayez recours à l’expérience de vos pairs, allez à la rencontre des Conseillers Principaux d’Éducation et de vos équipes de direction.

Enfin, j'espère sincèrement que ces quelques mots auront retenu votre attention et qu'ils vous donneront les moyens de débuter cette nouvelle rentrée en douceur.

Ketty JOLY
CPE depuis 21 ans et formatrice académique depuis 4 ans

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Commentaires

  • Estifanos — 26 juillet

    Très bel article!

  • Régine — 12 octobre

    Quand on a compris et intégré ces principes fondamentaux, la relation devient constructive à tous les niveaux ! Loin de la recette miracle (qui la cherche encore ????), des ustensiles à manipuler avec un savant dosage entre tous les ingrédients à notre disposition...

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