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Connaître, comprendre et identifier les stratégies cognitives à mobiliser pour apprendre à apprendre

Fanny Leblond
7 novembre 2022 13:20

Ce contenu fait partie du parcours Apprendre à apprendre : aussi une histoire de relation

Dans leur ouvrage Enseigner aux élèves comment apprendre - Du labo à la classe, Grégoire Borst, Émilie Decrombecque et Jérôme Hubert proposent des pistes pour nous permettre de rendre visible et lisible pour nos élèves ce qui se passe dans leur tête pendant l’apprentissage, et ainsi favoriser la réussite de tous et toutes.

Apprendre comment fonctionne son cerveau dans les apprentissages pour développer une vision moins fixiste de son intelligence

Si nous avons tous et toutes un cerveau, si nous l’imaginons sans peine, tels les deux hémisphères de la noix dans sa coquille, nous savons finalement bien peu de choses sur cet organe complexe qui fonctionne 24 heures sur 24. Tour de contrôle de notre corps, il est indispensable à la vie : bouger, parler, lire, écrire, comprendre, ressentir des émotions, entrer en relation avec les autres, se souvenir, rêver… seraient impossibles sans le cerveau. Si on demande à nos élèves : “Quel organe te permet de comprendre ce que tu lis ?”, “Quel organe te permet d’apprendre ?”, tous répondront : le cerveau. Mais savent-ils ou elles comment le cerveau est organisé, comment il fonctionne ? 

Souvent présenté comme le siège de l’intelligence, le cerveau est ainsi l’objet de nombreux mythes : on n’utiliserait que de 10% de la capacité de notre cerveau, il y aurait des personnalités cerveau droit ou cerveau gauche, il existerait une période critique pour l’apprentissage. Tout ceci laisserait à penser qu’entre fatalité et hérédité, les cartes sont jouées. C’est ainsi qu’on voit des mines résignées et des regards abattus aborder la leçon du jour, au nom du “je suis nul en maths”, “je déteste l’orthographe comme mon frère !”. Pourtant, le cerveau se développe jusqu’à 25 ans, et même au-delà, il continue à se modifier au cours des apprentissages.

Dans le cerveau, il y a de petites cellules qui s’appellent des neurones. Ces cellules envoient et reçoivent des informations. Quand on apprend quelque chose de nouveau, les neurones s’activent et à force de répétition (d'entraînement), le cerveau crée des connexions nouvelles entre les neurones, et ce tout au long de la vie. 

On dit que notre cerveau est plastique : par exemple, on peut apprendre une langue étrangère à tout âge, cela demande du temps, des efforts et de la persévérance, mais le potentiel de progression dans les apprentissages est bien là, pour tout le monde, et encore plus lorsqu’on est enfant. Alors, apprendre comment fonctionne notre cerveau, c’est s’autoriser à progresser, et ça, ça renforce vraiment l’estime de soi ! 

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Apprendre l’attention et la concentration explicitement pour les mobiliser intentionnellement

De toute évidence, l'attention et la concentration de nos élèves fluctuent au cours de la journée et nous sentons bien les moments de décrochage qui vont se manifester par une hausse du volume sonore, du mouvement, des interpellations hors propos comme “Maîtresse, comment elle fait la mouche pour marcher au plafond ?”, alors que vous achevez la phase de découverte sur la division d'un nombre décimal par un nombre entier.

L’attention, la concentration mobilisent des ressources physiologiques importantes. Notre cerveau consomme beaucoup d’énergie (20% de notre consommation de glucose et 80% de notre consommation d’oxygène). On comprend alors qu’il soit difficile de rester concentré plusieurs heures, tout comme mener de front plusieurs tâches. Aider notre cerveau à mobiliser son attention de manière intentionnelle, à rester concentré, c’est un entraînement essentiel pour bien apprendre. Rester attentif durant tout un cours, c’est un véritable marathon. Quel coureur irait vers une telle épreuve sans s'entraîner ? 

L’attention, ça s’apprend et c’est l'objet du programme ATOLE. Son objectif est d'aider l'élève à mieux comprendre son cerveau et les forces qui bousculent son attention au quotidien, et à apprendre à mieux y réagir, non seulement en classe mais également en dehors. Nous pouvons, en classe, enseigner explicitement les principes qui régissent l’attention et la concentration qui sont un enjeu de réussite pour tous et ainsi donner à nos élèves les clés du contrôle attentionnel : 

  • savoir mobiliser sa “vie mentale” pour contrôler son attention ;
  • découper les tâches complexes en tâches simples et courtes ;
  • savoir repérer les signes de décrochage attentionnel pour se recentrer sur la tâche à accomplir ;
  • être capable de programmer son attention pour une tâche donnée en associant la perception, l’intention et la manière de faire (PIM).
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Apprendre à mémoriser pour mobiliser ses mémoires avec efficience

Mémoriser, pour certains c’est facile ; pour d’autres, le vrai casse-tête ! Tasmine connaît parfaitement la poésie et la récite sans une faute, alors que Gabriel, qui a passé sa soirée devant son cahier, bute sur les strophes. “J’ai pas de mémoire ! J’arrive pas à apprendre”, dit-il avec un sentiment d’impuissance. Pourtant, Gabriel peut vous réciter le nom et le poste de tous les joueurs de l’équipe de France de football dans l’ordre. Ceci illustre que faire apprendre par cœur n’est pas le moyen de développer les meilleures capacités de mémorisation, contrairement à ce que beaucoup pensent. 

Là encore, des techniques existent pour mobiliser et entraîner non pas sa, mais ses mémoires, car il existe différents types de mémoires :

  • la mémoire de travail, temporaire et limitée : c’est ce que nous avons à l’esprit à l’instant présent ; 
  • la mémoire à long terme procédurale, automatisée : elle nous permet par exemple de lire, de conduire, de jouer d’un instrument de musique ; 
  • la mémoire à long terme sémantique : c'est ce que nous savons, nos connaissances ;
  • la mémoire à long terme épisodique : ce sont les souvenirs de ce que nous avons vécu.

 

Dès lors, enseigner aux élèves le fonctionnement et les techniques qui peuvent favoriser la mise en mémoire, comme tester ses connaissances de manière régulière, lire les réponses exactes, tester des connaissances plus anciennes, trouver la question d’évaluation à partir de la réponse, échelonner ses révisions dans le temps pour mémoriser à plus long terme (rôle de consolidation du sommeil) et ajuster nos pratiques évaluatives au sein même de la classe, sont des stratégies efficaces.

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Apprendre à inhiber pour déjouer les pièges que nous tend notre cerveau

Pour apprendre, nos élèves doivent engager des processus mentaux de haut niveau. Pour cela, ils font appel aux fonctions exécutives que sont la mémoire de travail, le contrôle inhibiteur et la flexibilité cognitive. Elles nous permettent d’agir de façon organisée pour atteindre nos objectifs. Quelle que soit la tâche à accomplir (faire un exercice, écrire, lire, jouer du piano), nous avons besoin :

  • d’une bonne mémoire de travail pour garder en mémoire des informations et les organiser ;
  • d’un bon contrôle inhibiteur, pour éviter les distractions et rester concentré ;
  • de flexibilité cognitive, pour être créatif et ajuster nos stratégies en cas d’erreurs.

 

La planification, la résolution de problèmes ou le raisonnement, qui sont au cœur des attentes scolaires, sont des fonctions exécutives de haut niveau, qui se construisent sur la base de ces mécanismes de contrôle et d’inhibition. On comprend donc leur importance dans les processus d’apprentissage. Ainsi, apprendre à nos élèves à questionner les routines et automatismes qui sont en place (stratégies peu coûteuses à mettre en œuvre) et les sensibiliser au rôle essentiel du contrôle inhibiteur permet de les engager dans des stratégies plus efficaces pour apprendre. 

En classe, il s’agit de mettre en œuvre le “penser avant d’agir”. Pour cela, vous pouvez jouer aux questions pièges. Chaque jour, une routine consiste à glisser dans les énoncés proposés aux élèves une consigne piège. À eux de déjouer ce piège, en repérant quel exercice n’est pas réalisable. Vous pouvez aussi, dans un exercice, indiquer qu’une stratégie initiale doit être dépassée et demander aux élèves de verbaliser laquelle. Par exemple : comparer deux nombres décimaux, 5,25 et 5,125. Si l’élève utilise la règle de comparaison des nombres entiers, il n’aura pas la bonne réponse, pensant que 125 est supérieur à 25. 

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Faire la place aux émotions pour apprendre dans un milieu sécure

Chacun et chacune d'entre nous, adulte comme enfant, vit dans un flux permanent d’émotions. Et c’est bien ainsi, car cela nous permet de réagir à notre environnement et d’adapter notre réponse comportementale. Émotions positives telles que la joie, qui procurent du plaisir et ouvrent aux autres ; ou négatives, telles que la peur ou la tristesse, qui engagent du repli sur soi : nous avons tous et toutes éprouvé ces émotions. Comment interviennent-elles dans les apprentissages ? 

Au-delà du bien-être, essentiel à un climat de classe serein et propice à l’apprentissage, arrêtons-nous sur le rôle des émotions dans les processus mentaux d’apprentissage. Pour user de flexibilité cognitive, les élèves doivent pouvoir identifier leurs erreurs. La détection des erreurs par le cerveau est en partie émotionnelle. Le cerveau s’appuie sur le souvenir d’émotions ressenties dans des situations similaires, il reconnaît son erreur et fait le choix d’une nouvelle stratégie. Mais pour cela, notre posture enseignante face à l’erreur doit rester neutre, et l’intérêt doit être porté sur la valorisation des stratégies, de l’effort, du partage de sa solution. 

Reconnaissons-le, nous sommes peu enclins à nous remettre à la tâche lorsque le commentaire donné à voix haute est “C’est encore faux ! Tu n’as pas la bonne solution !”, qui sonne comme une fin en soi, alors qu’une relance comme “Souviens-toi de ce qu’on a fait dans l’exercice précédent. Tu y es presque” peut engager le processus d’apprentissage favorablement. On voit ici que selon le statut de l’erreur et l’accompagnement de la gestion émotionnelle de l’élève par l’enseignant ou l'enseignante, notre retour peut être encourageant ou décourageant pour les apprentissages. 

On connaît aujourd’hui l’effet toxique du stress sur le cerveau - surtout sur celui des enfants et adolescents en pleine construction. Accompagner nos élèves dans leur parcours en les outillant pour qu’ils ou elles apprennent à accueillir leurs émotions, et à les réguler en leur faisant ressentir plus d’émotions positives et moins d’émotions négatives, c’est un gage de réussite et d'épanouissement scolaire et personnel.

Vous pouvez pour cela accompagner vos élèves à prendre conscience de leurs propres pensées et émotions : apprendre à verbaliser leurs actions mentales, comprendre les stratégies qu’ils ou elles utilisent pour atteindre un but fixé, à travers les étapes qu’ils ou elles auront planifiées pour y arriver. Tout au long de ce processus, votre feedback sera essentiel, pour valoriser l’effort, le travail, le fait d’essayer, de persévérer. 

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Croire en la réussite de tous nos élèves, c’est leur donner les clés pour comprendre qu’ils ou elles sont en capacité de progresser, ont des outils, et que nous sommes là pour accompagner l'apprentissage des connaissances et techniques pour les utiliser. 

Les apprentissages dans chaque domaine relèvent de la didactique des disciplines et des mécanismes cognitifs associés. Mais connaître le fonctionnement du cerveau, apprendre à mobiliser son attention, à se concentrer, à mobiliser ses mémoires avec efficience, à déjouer les pièges qu'il nous tend, et à faire une place aux émotions pour se sentir en sécurité d’apprendre, est le premier pas pour faire avancer la classe. C’est apprendre à apprendre, avant d’apprendre.

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