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Selon Philippe Meirieu, chercheur et spécialiste des sciences de l’éducation et de la pédagogie, « la classe est un lieu où on accède au commun ». Que l’on soit un ou une professeur·e débutant·e ou plus expérimenté·e, savoir poser le cadre avec ses élèves est une problématique au cœur du métier. Il relève de la responsabilité de chaque enseignant·e d’instaurer un climat propice à l’apprentissage des élèves dans sa classe. Pour cela, un questionnement sur ses pratiques, la qualité de la relation entre l’enseignant ou l’enseignante et les élèves, et le bien-être à l’école est nécessaire. Ce cadre questionne la pédagogie et les actions à mettre en œuvre avec les élèves pour former les citoyens de demain.
Un éclairage issu de champs disciplinaires différents du scolaire peut permettre d’affiner la notion de « cadre ». Dans l’exemple d’un cadre de bicyclette, il est l’élément principal du deux-roues auquel toutes les autres pièces sont reliées. Sans lui, le vélo ne peut fonctionner. Ce cadre permet une stabilité de la machine et offre à celui qui l’utilise une autonomie et une sécurité de déplacement. Dans le domaine artistique, on pose un cadre autour d’une œuvre, on l’encadre. Une valeur particulière est alors accordée à ce qui est à l’intérieur du cadre. Dans le domaine photographique ou cinématographique, cadrer, c’est choisir ce qu’il est important de mettre en lumière. C’est aussi interpréter et comprendre.
Quels vont être alors les éléments à retenir pour délimiter les contours du cadre dans le domaine scolaire ?
Afin d’adapter au mieux la pratique de classe et l’ancrer dans la réalité, il est nécessaire de s’intéresser au développement de l’enfant. Des études neuroscientifiques mettent en exergue l’importance du rôle de l’environnement et du cadre scolaire lors de l’apprentissage. De ce fait, l’enseignant·e doit instaurer une atmosphère de bien-être et de bien vivre à l’école. Comme le démontrent les travaux de Catherine Gueguen, un climat de stress abîmerait le système neuronal de l’élève et empêcherait un bon apprentissage. Pour apprendre, l’enfant doit donc être accompagné·e avec bienveillance.
Le cerveau de l’enfant est encore immature. Il sera totalement opérationnel autour de 25 ans. L’enfant va traverser des tempêtes émotionnelles jusqu’à l’âge de 5/6 ans. Il aura besoin de l’adulte pour se calmer. Il est primordial de l’accompagner dans la gestion de ses émotions en communiquant avec lui ou elle et en l’apaisant. C’est la constance de l’adulte dans le temps et sa bienveillance qui permettent cet apprentissage.
L’enfant a besoin de se sentir en sécurité pour grandir, il a besoin de limites claires, compréhensibles et justes. En entrant à l’école maternelle, il va vivre dans une micro-société et va devoir s’y habituer progressivement. En référence à la pyramide de Maslow sur les besoins de l’enfant, la recherche montre l’importance du besoin de sécurité et de stabilité. Les règles, les interdits et les frustrations sont nécessaires à la construction de la socialisation de l’enfant. Il doit comprendre qu’on ne peut pas tout faire. L'enfant doit apprendre l’importance de préserver son intégrité physique, psychique, émotionnelle et relationnelle. L'enseignant·e est le ou la garant·e de ce qui se passe dans la classe. Il ou elle accompagne l'élève dans l’intégration des premières valeurs humaines et citoyennes.
L’encart sur la formation d’un enseignant du ministère de l’Éducation nationale stipule : « L’école est partie prenante dans la formation des futurs citoyens, à ce titre elle doit dispenser les règles du vivre ensemble, inciter à la tolérance et au respect d’autrui. »
On comprend alors les principes fondateurs de la charte de classe. Elle nécessite que l’enseignant·e ait une réflexion en amont sur les principes à instaurer au sein de sa classe, pour fixer un cadre adéquat. Quelles sont alors ces valeurs à mettre en place ? Sécurité, liberté, égalité, fraternité, solidarité, autonomie, justice, tolérance, respect, coopération : autant de points fondamentaux sur lesquels mettre l’accent dans une salle de classe.
« La classe est le lieu d’émergence de la loi et non pas le lieu d’application des règlements » explique Michel Develay, instituteur et docteur en didactique des disciplines. Une charte définit les droits et les devoirs de chacun et chacune. Elle délimite les règles de fonctionnement dans la classe et de socialisation. Pour que les élèves fassent l’apprentissage de la vie collective et qu’ils et elles se sentent intégré·es dans le groupe, il est nécessaire que tous et toutes comprennent et acceptent ces règles. Une charte doit permettre avant tout une réflexion active de l’élève sur ce qu’il ou elle peut ou doit faire. Comme par exemple :
Les élèves doivent apprendre à respecter cette charte. Ils et elles gagnent ainsi la confiance des adultes et de leurs camarades de classe, deviennent autonomes et responsables de leurs actes. Un cercle vertueux qui valorise l’enfant à travers ses actes. On comprend l’importance de formaliser cette charte pour qu’elle soit clairement énoncée par les élèves et garante de stabilité et de sécurité.
Quelles vont être les règles principales à mettre en place ?
Les règles vont être élaborées collectivement et vont s’ancrer dans le vécu des élèves. Elles vont répondre à des problèmes de classe de différentes natures et vont permettre de vivre et apprendre ensemble.
Pour l’enfant, adapter ses comportements en tenant compte de ses besoins et de ceux des autres est une vraie difficulté. Passer du cadre familial au cadre scolaire crée des tensions et lui demande un apprentissage. Le cadre de vie étant différent pour chaque enfant, le rythme d’adaptation à cette nouvelle micro-société peut différer d’un ou une élève à l’autre.
Se comporter correctement avec ses camarades, les écouter et les respecter nécessite un véritable apprentissage pour l’élève. Les limites et les règles doivent être claires et le non-respect du cadre expose l’enfant à des sanctions.
La sanction éducative est d’abord et avant tout un rappel à la règle. Elle doit être graduée, proportionnelle à la situation et s’appuyer sur des faits. La sanction peut prendre aussi prendre la forme d’une privation temporaire des droits. Par exemple : l’élève a le droit de rouler en vélo dans la cour, mais il ou elle a aussi le devoir d’adapter sa vitesse pour ne pas mettre en danger ses camarades. Dans un premier temps, si l'élève roule trop vite, l’enseignant·e lui rappelle la règle. Si après ce rappel, l’élève ne la respecte toujours pas, il ou elle sera alors privé·e temporairement de vélo.
Pour que cette situation soit éducative, l’enseignant ou l’enseignante doit la justifier à l’élève : « Puisque ce n’est pas encore possible pour toi de mettre en sécurité tes camarades, c’est moi qui dois le faire. Donc quand tu seras prêt ou prête à respecter cela, tu pourras reprendre le vélo. »
De même, dans le cas de la mise à l’écart temporaire d’un ou une élève lorsqu’il ou elle perturbe le travail de groupe, l’enseignant·e a le devoir de lui rappeler que cette sanction va l’aider à retrouver son calme intérieur. L’enfant trouve alors dans l’adulte un appui, un repère qui ne change pas et le rassure. La communication et la compréhension de cette sanction pour l’élève sont les bases de son acceptation. La sanction éducative s’accompagne d’une démarche réparatrice. De l’excuse à la réparation concrète d’un dégât commis, il s’agit de permettre à celui ou celle qui a commis l’erreur de se réhabiliter et à la victime d’être reconnue.
Si on s’appuie sur les travaux d'Eirick Prairat, chercheur et professeur de sciences de l'éducation, la sanction éducative comprend quatre principes :
Il convient pour le ou la professionnel·le de l’éducation d’engager une réflexion sur la nature de la sanction suivant les droits et de comprendre ce qui pousse l’enfant parfois au non-respect de ce droit.
La bienveillance est une vertu fondamentale avec les enfants, car elle tient compte de leur développement. C’est une « posture éthique », comme le souligne Christophe Marsollier, docteur en sciences de l’éducation. Il est de la responsabilité de chaque professeur·e d’en comprendre les enjeux et de s’interroger sur la qualité de sa présence et de l’intérêt porté à chacun et chacune de ses élèves. Bien entendu, bienveillance et empathie ne vont pas l’une sans l’autre, et faire preuve de ces qualités est primordial pour un ou une enseignant·e.
Pour apprendre, les enfants doivent se sentir « heureux d’apprendre », comme le souligne Catherine Gueguen, et « les adultes, heureux de les accompagner sur ce chemin ». Cette approche laisse entrevoir l’impact pour les élèves d’avoir un ou une professeur·e qui fait preuve d’enthousiasme dans son métier. Chaque enseignant·e construit sa représentation du métier qui dépend bien souvent de son propre parcours scolaire. La bienveillance fait partie intégrante de cette représentation. Elle se développe et s’affine au fur et à mesure de la carrière de l’enseignant ou enseignante.
La bienveillance s’accompagne de l’exigence. Elle n’est en aucun cas une attitude laxiste. Elle permet d’accompagner et de faire progresser chaque élève dans le plus grand respect.
L’autorité éducative est un terme récurrent dans la politique éducative française. Elle n’est pas une capacité innée, mais plutôt « un art de faire. [...] La véritable autorité est celle qui permet de faire ensemble », comme l’écrit Philippe Meirieu.
L’autorité est un geste professionnel et une relation aux élèves qui se construit. Si on s’appuie sur les travaux de Bruno Robbes, l’autorité éducative ne se confond ni avec la discipline scolaire ni avec le pouvoir. Elle est légitime et fondée sur l’humain. Elle est différente de l’autorité naturelle et se construit en s’appuyant sur la base de la confiance avec l’élève en recherchant son consentement pour son bien. C’est une autorité juste et efficace par laquelle le ou la professeur·e va demander à l’élève d’obéir, mais sans soumission, car cette obéissance sera comprise.
L'autorité se base sur la communication et sur des actions concrètes. C’est une autorité bénéfique qui se construit davantage de manière horizontale que verticale. Au sein de cette autorité, la place de l’erreur est reconnue et comprise. C’est une source d’apprentissage, inscrite dans le parcours de l’élève. Le travail sur l'erreur permet à l’élève un retour réflexif et une meilleure compréhension de la tâche à réussir. L'élève se sent alors en confiance, car il ou elle est accompagné·e avec bienveillance dans sa progression. L'enfant a besoin de temps pour construire son parcours d’élève.
Vivre ensemble peut engendrer des conflits entre les enfants et les adultes. Il est primordial d’apprendre ce « bien vivre ensemble » aux élèves. La pédagogie coopérative se base sur les relations collectives, la communication et l’entraide. C’est à travers diverses situations pensées par le ou la professeur·e que les élèves vont pouvoir développer leurs compétences sociales et émotionnelles.
Les jeux sont une mine d’or pour mettre en place la coopération en maternelle. Des jeux dans lesquels on gagne ou on perd ensemble, des jeux qui construisent le collectif et favorisent les échanges verbaux. Ce sont les compétences de chacun et chacune qui font la réussite de tous et toutes. Des activités physiques au jeu de plateau, les possibilités sont riches et nombreuses. La communication entre les élèves et le sentiment d’appartenance à un groupe sont mis en avant. L’enfant va apprendre à interagir de façon positive avec les autres, à partager et à s’exprimer. Il ou elle peut ainsi développer progressivement des compétences d’amitié et d’entraide.
Les espaces de parole, les rituels de communication comme le « Quoi de neuf ? », le conseil d’élèves ou l’atelier philo sont autant de moments riches qui permettent d’installer de la confiance et de développer les compétences citoyennes des élèves. Ils s’appuient sur des temps ritualisés inscrits à l’emploi du temps, qui délimitent un espace convivial de parole. Le rôle de l’adulte dans les situations coopératives est primordial. L’élève a besoin d’être guidé·e et de comprendre l’importance de sa place et celle des autres. Le ou la professeur·e éveille cette conscience chez les élèves et les invite à se tenir la main pour avancer ensemble.
Ainsi, établir un cadre clair au sein de l’espace scolaire est fondamental pour garder un climat bienveillant et garantir à l’élève un épanouissement lors de son apprentissage. Afin de délimiter un cadre clair, il est primordial d’y fixer des règles et des devoirs communs à l’ensemble des enfants, dans le but d’harmoniser la salle de classe en mettant tous les élèves sur un même pied d’égalité. Une fois un cadre réfléchi et des règles fixées par le ou la professeur·e et les élèves, la manière de les communiquer se doit de rester ferme, mais bienveillante.
L’essentiel dans l’instauration d’un cadre clair est le développement de l’enfant, aussi bien scolairement que dans l’acquisition de ses premières valeurs citoyennes. C’est donc pour cela que ce cadre doit nécessairement aller dans le sens du respect des autres, en s’appuyant sur le vécu des élèves.
Isabelle Dahl
Professeure des écoles, maître formateur spécialisée en école maternelle.
C’est en découvrant le cadre et en se l’appropriant que l’enfant devient autonome. Construire une posture enseignante bienveillante et exigeante qui cadre et sécurise, concevoir et installer des règles à portée d’enfant est donc essentiel pour favoriser les apprentissages.
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