"Après avis du conseil des maîtres, le directeur répartit les élèves en classes et groupes et arrête le service de tous les enseignants nommés à l'école."

Voilà pour la théorie… Mais dans la pratique, entre desideratas, professionnalisme, mesures de carte scolaire et déménagements, des tensions peuvent rapidement apparaître entre collègues. 

La préparation de la structure et de la constitution des classes pour la rentrée prochaine est un moment anxiogène pour les équipes. Alors, quand on est directeur ou directrice, pour éviter de se retrouver pris dans l'œil du cyclone, voici quelques pratiques inspirantes à adapter, compléter et personnaliser !

Mon école n’échappe pas à la règle : dès lors que le mouvement ouvre, le jeu des spéculations sur la structure de la rentrée prochaine fait son grand retour. Alors, pour aider mon équipe à se projeter objectivement, nous avançons étape par étape, en nous laissant le temps de la réflexion et de l’échange entre chaque phase. 

Conseils pratiques

• Bien avant la période 5, pour éviter d’être pris par les tensions, décider collectivement des règles d’attribution des classes : ancienneté dans le niveau, PPCR prévu, passage d’un examen, s’être dévoué(e) l’année précédente, etc.
• Au moment de la carte scolaire et du mouvement, s’assurer que les informations indispensables circulent : mesure de carte scolaire, mutations, calendriers des opérations, postes vacants, etc.
• Une fois l’enquête de rentrée faite, mettre à disposition des collègues les prévisions d’effectifs et les moyens alloués afin qu’ils puissent réfléchir à la structure (voir ci-dessous).
• Environ 1 semaine après, programmer un conseil des maîtres pour arrêter la structure sans évoquer l’attribution des classes. 
• À l’issue du premier mouvement, programmer un second conseil des maîtres pour attribuer les classes.
• Avant les commandes, constituer les classes.

Dans une école de 19 classes qui bénéficie du dispositif CP-CE1 100% réussite, les options sont nombreuses pour le choix des classes : plusieurs classes par niveaux, doubles niveaux, binômes, petits groupes, etc. 

Nous avons donc fait le choix de fonctionner par voeux et avons établi des règles de priorité d’attribution, que nous n’hésitons pas à réinterroger si elles ne nous paraissent plus adaptées. 

Conseils pratiques

À chaque école son style ! Voeux, priorités, reprise de la structure existante, tirage au sort : nous essayons chaque année pour le plaisir, et bizarrement, le résultat est souvent recevable. L’essentiel est de se mettre d’accord sur une méthode explicite et juste que chacun doit se sentir libre de soumettre au changement si cela lui semble nécessaire. 

À ces règles, s'ajoutent les préconisations institutionnelles non négociables dont le directeur est le garant et à qui la décision finale reviendra, puisqu’il est responsable de la répartition des moyens. En cas de désaccord, l’IEN pourra être consulté pour trancher. 

Tout le monde doit être au clair avec l’ensemble de ces règles pour pouvoir les respecter, il est donc essentiel de les diffuser et de les rappeler autant que nécessaire, et tout particulièrement avant de se lancer dans l’attribution des classes. 

Pour établir collectivement, des règles de priorités d’attribution : 

• Noter les préconisations institutionnelles dans une colonne et lister toutes les propositions des collègues dans une autre colonne.
• Retenir collectivement 3 critères et les ordonner par importance.
• Garder une trace écrite de la décision prise par le conseil des maîtres et la diffuser.

Il y a ceux qui adorent faire des propositions, ceux qui ont besoin d’une structure modèle pour guider leur réflexion et ceux qui suivent de loin… Quelle que soit la participation, tout le monde s’y intéresse et très souvent les propositions faites sont sensiblement les mêmes. 

Conseils pratiques

• Impliquer les collègues dans la recherche d’une structure équilibrée leur permet de mieux cerner les enjeux et les limites. Une décision dont on est acteur est toujours mieux acceptée. D’autant plus lorsqu’il va être nécessaire de mettre en place des doubles, voire triples niveaux, que personne n’a très envie de prendre…

• Pour lever les résistances, raisonner par l’absurde pour mettre en lumière les déséquilibres générés s’avère très efficace. À ce stade de recherche, tout est autorisé : éliminer les niveaux multiples, laisser chacun s’attribuer le niveau de classe dont il a envie, etc. La comparaison entre la structure rêvée et la structure équilibrée sera sans appel. 

• Si vous êtes sous le coup de fermetures ou d’ouvertures conditionnelles, anticipez en proposant plusieurs solutions, qui permettront de s’adapter en opérant le moins de changements possible en cas de besoin.

Pour nous, c’est le moment de bien préparer ses cartes ! Rien de ludique, juste de la logistique : on prévoit une carte par enfant (de la taille d’une carte à jouer), avec une couleur pour les filles, une autre pour les garçons et quelques informations essentielles sur le comportement et les acquisitions.

Conseils pratiques

• Proposer des outils qui aident les enseignants à objectiver le profil de leurs élèves, en s’appuyant sur quelques critères simples : sexe, comportement, niveau d’acquisition, besoins particuliers (voir la fiche-outil ci-dessous).

• Programmer un temps de réflexion, avec a minima les enseignants actuels des élèves et les enseignants qui les auront l’année suivante dans lequel chacun pourra s’exprimer. Quand l’école compte beaucoup de classes, il peut être pertinent de ne pas regrouper toute l’équipe.

• Constituer les classes avant de les attribuer à un collègue.

• Valider ! Ou pas … C’est à vous que revient la (lourde) responsabilité d'entériner la répartition finale en veillant à ce que les groupes constitués soient homogènes, à ce que les collègues nouvellement nommés ne soient pas accablés ou que ce soit toujours les mêmes enseignants qui soient sollicités.

Poser les limites avec mes collègues n’est pas la mission de directrice avec laquelle je suis le plus à l’aise, mais je sais que c’est une condition sine qua non pour maintenir un cadre de travail constructif et bienveillant. 

Conseils pratiques

Pas toujours facile de rester objectif quand on est tiraillé entre nos responsabilités et l’affect que nous avons pour nos collègues, particulièrement au moment de la répartition des classes.

• Anticiper ! Mieux vaut prévenir que guérir. Pour prendre de bonnes décisions, vos collègues ont besoin de connaître précisément le cadre dans lequel s’inscrit leur action.

• Distinguer les règles qui peuvent être discutées en conseil des maîtres de celles qui ne sont pas négociables : la grande majorité des règles qui régulent notre travail sont inscrites dans la loi ou les textes officiels. Elles s’appliquent à tous, directeur compris.

• Expliciter clairement à l’équipe votre rôle et les limites de votre mission : vous avez la responsabilité d’arrêter la répartition des moyens, d'être garant du bon fonctionnement de l’école.

Associer vos collègues à la réflexion favorise une meilleure compréhension de la situation et une meilleure acceptation des décisions, mais cela ne peut se faire sans une bonne connaissance du cadre réglementaire. 

Élodie Leclercq, directrice en cité éducative d’une élémentaire REP de 17 classes depuis 2013