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5 astuces pour alléger sa charge mentale en classe

Sophie Defour
20 décembre
8 mn

Comme beaucoup de profs dans le secondaire, j’ai déjà ressenti un épuisement dès le matin, à peine réveillée, accablée par les piles de copies, les PAP à compléter, les appels aux parents… Avant même d’arriver au collège, je me demandais comment j’allais convaincre Philippe de rester assis ou faire taire Maël sans scotch ! La fatigue s’accumulait, ma voix se brisait et le quotidien devenait pesant. 

J'ai compris qu'il était temps de lâcher prise et de laisser mes élèves gagner en autonomie. 

Dans cet article, je vous propose cinq astuces pour alléger votre charge mentale et encourager l'initiative des élèves. Ces conseils visent à instaurer un climat de confiance où chacun apprend mieux, et avec plus de sérénité !

Astuce n°1 - Instaurer des rôles au sein de la classe

Il y a eu des moments très difficiles dans ma carrière, et l’un des plus marquants fut le jour où l’on m’a annoncé que mes cordes vocales ne pourraient pas supporter la charge de mon métier d’enseignante (je vous le raconte ici).

À 29 ans, passionnée par mon métier et après avoir décroché mon concours avec de nombreux sacrifices, on me proposait une inaptitude professionnelle. Inapte, car je ne pouvais pas parler toute la journée. Inapte, car une enseignante doit se faire entendre. Cette nouvelle m’a anéantie. Complètement déprimée, au bout du rouleau, j’en ai parlé à mon amie, CPE du collège. Pour elle, cette décision était absurde.

« Inapte ? Tu es handicapée, pas inapte !  Regarde les choses autrement. Ce que tu ne peux pas faire, fais-le faire aux élèves. »

 

Étonnée, je l’ai écoutée en silence. Pour moi, enseigner signifiait tout faire moi-même. Un bon professeur, ça se démène, ça parle, ça explique... Bref, ça fait tout !

Terrifiée par cette idée, mais n’ayant finalement pas d’autre choix, j’ai décidé d’essayer. J’ai commencé petit à petit . J’ai confié l’appel à un élève, puis les dictées, puis les corrections d’exercices… et enfin, même certains aspects du cours ! 

À ma grande surprise, cela a été une véritable révolution. Les élèves ont adoré ces responsabilités, et cette nouvelle dynamique a transformé notre classe. Ce qui semblait au départ être un obstacle insurmontable s’est révélé une chance incroyable pour eux comme pour moi. Je pouvais enseigner malgré une malformation vocale !

Mes conseils

 

  • Définir les rôles. Identifiez des tâches que les élèves peuvent facilement gérer de façon autonome à votre place. Vous les trouverez en images ici. (Je vous conseille de ne garder que les images. L’explication en dessous de l’image n’est utile que pour la présentation des rôles.) Pour les rôles lors des travaux de groupe, c'est ici ou ici ! Pensez à adapter les responsabilités selon l’âge et le niveau de vos élèves.

 

  • Déterminer la fréquence .Pour éviter la lassitude, proposez un roulement chaque semaine ou chaque mois.

 

  • Évaluer les responsabilités. Après chaque période, organisez un moment de retour avec les élèves. Demandez ce qu’ils ont aimé ou trouvé difficile, et ajustez les rôles en fonction de leurs retours pour que chacun y trouve un intérêt.

 

Astuce n°2 - Valoriser l’autonomie avec des défis et objectifs personnalisés

Tout au long de ma carrière, j’ai forcément travaillé avec des élèves aux profils très variés. Cette diversité était à la fois une richesse et un défi. En effet, peu importe les activités que je proposais, le fossé entre leurs niveaux et leurs besoins était immense. Mon enseignement ne parvenait pas à satisfaire chacun d'eux, et je me sentais souvent débordée. 

Face à cette situation, je me suis demandé comment engager chaque élève tout en tenant compte de leurs singularités sans me mettre sur les épaules un boulot de fou ? Comment personnaliser et différencier sans me perdre dans des heures et des heures de préparation ? 

J'ai alors décidé de proposer des défis adaptés et des objectifs individuels. Cette approche a non seulement transformé la dynamique de ma classe, mais m’a également libérée de la pression de devoir constamment ajuster mon enseignement pour répondre aux besoins de chacun. En adaptant les défis, j'ai pu observer un changement dans leur attitude et leur engagement.

Mes conseils

 

  • Proposer des défis adaptés, individuels ou par groupe, et par paliers de difficultés (des exemples ici et ici). Les défis peuvent être en lien avec un objet d'étude comme ici, le théâtre. Par exemple, pour un élève avancé, vous pouvez imaginer un projet d'écriture plus long et complexe, alors qu'un élève en difficulté pourrait travailler sur des exercices plus simples, mais avec des objectifs très concrets comme enrichir son vocabulaire ou structurer ses phrases. Ces défis permettent à chaque élève de travailler dans sa zone de confort tout en relevant des défis qui le feront progresser. Si les défis sont trop complexes, ils risquent de ne pas les faire, le risque est le même s’ils ne sont pas assez difficiles.

 

  • Mettre en place des objectifs personnalisés. Les élèves peuvent se fixer des objectifs spécifiques et atteignables pour renforcer leur motivation et leur implication dans leur scolarité. Avec les élèves en difficulté, des petits pas peuvent renforcer leur confiance, tandis que les élèves les plus avancés peuvent être stimulés avec des objectifs plus ambitieux. Cette approche aide chaque élève à comprendre ses propres progrès, même s’il ne suit pas le même parcours que les autres.

 

  • Faire un suivi régulier et valoriser les réussites. Instaurer des moments réguliers pour échanger sur les défis et les progrès de chacun. Les élèves sont fiers de proposer leur chef-d’œuvre ou de les voir affichés en classe. Le suivi aide les élèves à garder leur motivation, et les retours personnalisés montrent que leurs efforts sont vus et valorisés, et renforce leur sentiment de compétence et d'autonomie.

 

 

Astuce n°3 - Impliquer les élèves dans des projets collaboratifs

Je suis professeure de lettres et donc passionnée de lecture - et donc convaincue de son pouvoir pour éveiller l’imagination ! C’est un sacré handicap ! Comment comprendre mes élèves pour qui un livre est un monstre à éviter ? Comment cultiver l'amour de la lecture chez eux ? La simple idée d'ouvrir un roman les rebute, quel que soit leur niveau. Lire leur est une corvée insurmontable, bien éloignée de leurs envies et de leur univers.

Un jour, je tombe sur le blog d'une professeure des écoles qui proposait des dégustations de livres. L'idée m’a immédiatement plu. Pourquoi ne pas tenter quelque chose d’inédit ? Justement, Halloween approche, une période idéale pour stimuler l’imaginaire ! Je décide de transformer mes élèves en "dégustateurs" d’histoires, et, lors d'un goûter hanté (ici en vidéo), leur faire "goûter" des livres comme s’ils allaient découvrir des friandises étranges ou des mets horribles

Un goûter littéraire hanté

Je décore la classe avec tout le tralala d'Halloween : nappes sombres, toiles d’araignées, fausses araignées et squelettes. J’accueille mes élèves déguisée en sorcière, avec mon chapeau pointu et un sourire malicieux. En entrant dans la salle transformée, mes élèves ont été abasourdis. Je leur ai alors annoncé, d'une voix mystérieuse, qu'ils allaient aujourd'hui déguster des objets affreux : des livres !

J’ai choisi soigneusement les ouvrages, en les présentant comme autant de mets exotiques qu’ils allaient découvrir. Peu à peu, les élèves, amusés par le décor et cette mise en scène, ont commencé à s’intéresser. Ils ont feuilleté les premières pages, partagé leurs premières impressions, échangé leurs commentaires sur les personnages et les intrigues. Contre toute attente, ils se prenaient au jeu.

Les photos du goûter littéraire hanté dans ma classe 

 

Un concours de lecture à voix haute

La magie de la lecture venait de se déclencher, tout en douceur et en rire. Alors que je réfléchissais à la suite, je me suis souvenue d’un concours de lecture à voix haute lancé par l’émission La Grande Librairie, de France 5. C’était le moment idéal pour lancer un nouveau défi à mes élèves. L’idée d'une compétition les a immédiatement motivés : participer à un concours, devenir des champions de lecture à voix haute, c’était un but excitant !

Et la cerise sur le gâteau ? Notre classe a été sélectionnée pour participer à une étape du concours ! Jean-Claude Mourlevat, multiprimé, notamment par le prix commémoratif Astrid-Lingren, est même venu à notre rencontre pour nous donner des conseils en personne. Mes élèves étaient aux anges, et moi… comblée ! Voir des jeunes qui autrefois rechignaient à ouvrir un livre lire avec passion, et même fierté, était pour moi une véritable consécration.

Depuis ce jour, j'ai appris à ne pas forcer, mais à laisser la curiosité les guider. Donner aux élèves la liberté d'explorer un texte à leur manière, les faire entrer dans un projet collaboratif où chacun trouve sa place, c'est les amener à lire sans s'en rendre compte. La lecture est devenue pour eux une aventure, et pour moi, une nouvelle façon de partager cette passion. 

Mes conseils

 

  • Encouragez la co-construction des réponses avec les élèves. Après avoir posé la problématique, organisez une session de réflexion collective pour recueillir les idées de chacun. Les élèves peuvent travailler en petits groupes pour échanger leurs idées, puis présenter des solutions en classe. Encouragez-les à poser des questions, à remettre en question leurs propres idées et celles des autres pour affiner les solutions. Ce processus de co-construction donne aux élèves une véritable autonomie, tout en les guidant dans une démarche de réflexion critique et créative.

 

 

ressources

Astuce n°4 - Simplifier la gestion avec des routines et rituels 

Je me souviens d’une année particulièrement compliquée où j’avais vraiment du mal à capter l’attention de mes élèves dès le début de l’heure. Un jour, j’ai pris le temps de les observer et je me suis demandé : et si je leur donnais une vraie raison de se concentrer dès le départ, quelque chose qui les mettrait tout de suite en action ? 

J’ai donc introduit une sorte de mot de passe pour le cours : cinq minutes, en début de séance, pour répondre à quelques questions rapides sur le cours précédent, avec une note sur cinq à la clé. À ma grande surprise, 99 % des élèves ont adoré ce rituel. 

Pour eux, c’était une manière simple de décrocher un 5/5 et, en plus, cela les mettait dans le bain pour la suite. Et pour moi, c’était une petite victoire. Puis, j’ai fait évoluer cette routine en leur proposant de prendre eux-mêmes les rênes : ce sont eux qui prépareraient les questions pour leurs camarades. Cette autonomie leur plaisait énormément, et l’idée de devoir poser des questions à la classe les motivait à bien retenir et comprendre le cours ! 

Renforcer les connaissances et la concentration des élèves

Ce système est bénéfique pour tout le monde : moi, je recueille de nombreuses notes sans stress pour les conseils de classe, et les élèves ont la possibilité d’améliorer leur moyenne avec ces petites évaluations régulières. Ils sont hyper motivés, car obtenir un 5 sur 5 n’est pas difficile : il suffit d’écouter dès le début. 

En plus, c’est très simple à corriger, car je ne leur demande que quelques mots en réponse, pas de longues phrases. Je pourrais même les faire corriger par d’autres élèves, ce qui allègerait encore davantage ma charge de travail mais je n’ai pas encore osé sauter le pas… 

Mes conseils

  • Instaurez un rituel de début de cours pour capter l’attention rapidement. Les premières minutes de cours sont cruciales pour poser l’ambiance. En commençant par une courte activité, vous créez une transition douce qui les met tout de suite dans le bain. Cette activité doit être rapide (5 minutes maximum) et stimulante, avec une évaluation simple à la clé (note sur 5, par exemple).

 

  • Mettez les élèves en action dès le départ pour renforcer leur engagement. La passivité est notre ennemi ! Une fois que le rituel de début de cours est installé, laissez progressivement les élèves le prendre en main en leur demandant de préparer eux-mêmes les questions ou les exercices de révision. Cela développe leur autonomie, tout en renforçant leur motivation à suivre et comprendre le cours, puisqu’ils devront ensuite interroger leurs camarades.

 

  • Facilitez la correction avec des formats courts et précis. Optez pour des réponses brèves (quelques mots suffisent). Les contrôles sur petite feuille facilitent non seulement la correction, mais aussi le suivi régulier de chaque élève. En n’exigeant que des réponses courtes, vous gagnez en efficacité : quelques minutes suffisent pour tout corriger.

 

ressources

Astuce n°5 - Laisser les devoirs au placard avec la classe inversée

 Vous connaissez les fameuses croix qu’on distribue pour les travaux non rendus ? Une croix ici, deux croix là, et à trois croix, bam ! une heure de retenue ! Avec 20 croix ? Un mot dans le carnet. Et alors, avec 50 croix, c’est carrément l’apocalypse ! Convocation des parents, menace d’une exclusion temporaire… 

Bref, c’était devenu un système implacable, mais usant, autant pour eux que pour moi. À force de compter et distribuer les croix, j’avais l’impression d’être plus une inspectrice qu’une prof de français. 

Un jour, j’ai réalisé que tout ce temps passé à contrôler les croix, c’était du temps en moins pour faire ce que j’aime vraiment : enseigner ! Sans parler des excuses interminables des élèves qui finissaient par devenir lassantes. C’est alors que j’ai découvert le concept de la classe inversée en cherchant des idées sur Internet.

l'essentiel

Le temps que je passais autrefois à distribuer des croix et des retenues, je le consacre désormais à ces activités en classe. Les élèves, même les plus réticents, arrivent beaucoup plus engagés, parce qu’ils savent que tout se jouera en classe. 

Ils ne risquent plus de se retrouver en retenue pour un devoir non fait, mais ils comprennent aussi que participer activement en classe est essentiel pour progresser. Plus de croix, plus de punitions, plus de sanctions, juste de l’apprentissage – et un gain de temps et d’énergie énorme pour tout le monde.

Mes conseils

  • Commencez petit : pas besoin de vidéos sophistiquées sur Youtube ! Des fiches PDF claires suffisent pour introduire les notions. Assurez-vous que le support soit accessible facilement depuis un téléphone ou une tablette, car tous les élèves n’ont pas forcément un ordinateur à la maison. Lancez votre activité de manière ludique, avec des outils numériques (on vous donne la marche à suivre ici !).

 

  • Donnez du sens aux activités en classe. La classe inversée prend tout son sens lorsque les élèves se rendent compte qu’ils ont besoin des notions vues chez eux pour réussir les exercices en classe. Proposez des activités en lien direct avec ce qu’ils ont découvert à la maison, comme des débats, des travaux de groupe, ou des exercices pratiques. Cela les encourage à se préparer en amont et valorise leurs efforts.

 

 

Un exemple de support pour la classe inversée au collège

 

En mettant en place des approches favorisant l’autonomie et l’engagement des élèves, comme la classe inversée ou la répartition des rôles, nous pouvons alléger notre charge mentale tout en renforçant l’apprentissage actif. 

Ces stratégies transforment la salle de classe en un espace collaboratif où chacun a un rôle, et où le travail en groupe favorise l’épanouissement de tous. Ces ajustements ont amélioré mon quotidien et mes élèves viennent en classe avec le sourire. 

 

Sophie Defour, professeure de lettres modernes au collège depuis 2008

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11 profs ont trouvé ce contenu utile

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Commentaires

  • tournesolrouge — 14 décembre

    Merci pour cet article qui me donne des idées pédagogiques alors que j'ai la tête dans le guidon... J'apprécie la proposition de ressources nombreuses.

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